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André Uzan

Ancien universitaire

Créateur d’entreprise

Concevoir une offre nouvelle.1 Concevoir une offre nouvelle.1

Concevoir une offre nouvelle, offre d’un produit ou d’un service, est une aventure passionnante mais risquée.

On peut concevoir une offre nouvelle sur la seule base d’une intuition ou d’une impulsion mais alors on maximise les risques d’échecs liés à cette approche de l’aventure de la création.

On peut aussi concevoir une offre nouvelle en suivant un processus pertinent et alors maximiser ses chances de succès.

Le graphique ci-dessous, construit et développé par A. Cowan, un jeune entrepreneur américain devenu enseignant à Darden School of Business (https://www.alexandercowan.com/venture-design/) présente un processus de conception de l’offre nouvelle qui mérite d’être connu et retenu par tout créateur car il synthétise tous les concepts actuels nécessaires et propose un mode opératoire pertinent.

Concevoir offre nlle

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

On peut ainsi résumer le processus décrit ci-dessus nécessaire pour concevoir une offre nouvelle :

1-On ne peut concevoir une offre nouvelle pertinente sans savoir pour qui créer, pour satisfaire quel besoin, pour aider à mieux résoudre quel problème, pour faire mieux que quel concurrent, etc.  C’est la question Who ? (Pour qui ?) qui doit trouver une réponse dans la construction d’un persona, concept qui précise les caractéristiques personnelles et professionnelles du destinataire de l’offre, les problèmes qu’il doit résoudre et les moyens alternatifs qui s’offre à lui, les arguments auxquels il est le plus sensible (voir promotion).

2-La question What ? (Quoi offrir ?) conduit à construire une ou plusieurs propositions d’offre (propositions de valeur) et de bien repérer les hypothèses qui sont faites quant à leurs pertinences, acceptabilités par les prospects visés et viabilités économiques.

3- La question What if ? (Que faire si ?) conduit à tester auprès de clients potentiels les hypothèses admises précédemment.

4-La question Show me (montre-moi.) conduit à demander au prospect de monter ce qu’il fait, comment il le fait et quel résultat il recherche.

5-Les résultats de la phase Show me peuvent conduire à reconcevoir l’offre (pivoter) si on a fait fausse route ou à définir les voies de la mise en œuvre de l’offre (How Scale ?).

 

La présentation de l’ensemble du processus nécessaire pour concevoir une offre nouvelle, trop longue pour un article, sera répartie sur deux articles.

Cet article-ci développera les deux premières questions ci-dessus : les notions de persona, de scénario de problème, et d’hypothèses testables de proposition de valeur.

L’article suivant développera les autres étapes du processus.

 

1.Persona et scénario de problème.

https://www.alexandercowan.com/tutorial-personas-problem-scenarios-user-stories/

 

1.1.Persona

1.1.1. Définition

Un persona est un personnage imaginaire représentant un segment cible d’acheteurs ou d’utilisateurs d’une offre et permettant à l’offreur d’ajuster, de personnaliser, les caractéristiques de son offre et ses actions de marketing.

Le profil du persona est une synthèse des caractéristiques observables du segment de prospects – cible mais exprimée de façon aussi « humanisée » que possible. C’est ainsi qu’il sera doté de caractéristiques personnelles (prénom, âge, genre, statut familial, etc.) ; de caractéristiques psychologiques (motivations, valeurs, etc.) ; de caractéristiques comportementales (habitudes, etc.) et de caractéristiques professionnelles (poste, responsabilités, défis principaux, outils utilisés, sources d’informations et moyens de communication préférés, etc.)

A titre d’exemple pratique simple, voir  https://www.hubspot.fr/make-my-persona

L’essentiel pour l’offreur est de bien comprendre le prospect-cible et ce qui compte pour lui ; afin de lui proposer une offre adaptée avec un argumentaire pertinent.

La création d’un persona provisoire est la première étape de tout projet de conception d’une offre nouvelle. Tout créateur d’une offre a, certes, en tête une première idée du destinataire de l’offre mais une idée floue et qui n’est qu’une hypothèse. Cette idée devra être testée, complétée progressivement, etc. mais on ne sait pas quoi tester ni auprès de qui sans repérer ce que l’on ne sait pas ou mal ; d’où l’idée de s’obliger à rédiger une première version du persona.

1.1.2. Les outils utilisables.

Pour cette rédaction, on peut essayer de repérer ce que le destinataire de l’offre pense, voit, ressent et fait (think, see, feel, do) dans le domaine visé par l’offre ; on peut aussi trouver l’inspiration en imaginant une journée ou un moment particulier de sa vie de travail ; on peut enfin utiliser la méthode « AIDA.OR » pour repérer les étapes de son parcours d’achat.

L’outil « pense, voit, ressent et fait » (Think-See-Feel-Do)

« Pense » fait référence à la rationalité du persona et en particulier à la définition de son problème (écart entre le vécu et le voulu).

« Voit » concerne les perspectives, les solutions recherchées.

« Ressent » concerne les émotions du persona ; ce qui le motive, le chagrine, le rend fier ou heureux.

« Fait » concerne le vécu professionnel et la préparation du futur.

L’outil journée de la vie de travail (« Day in the Life ») peut préciser comment le problème principal apparait et ce que le persona est conduit à penser, voir, ressentir, faire.

L’outil « AIDA.OR» (Attention, Intérêt, Désir, Action, Onboarding=intégration, Rétention), outil bien connu des vendeurs, concerne le parcours du client.

-Qu’est-ce qui attire l’attention du persona : une publicité, l’avis d’un ami, etc.

-Qu’est-ce qui suscite son intérêt, sa motivation : une solution à son problème, l’aide d’un ami ; un « modèle », etc.

-Qu’est-ce qui détermine son désir d’avoir : l’intensité du malaise, le désir de se faire valoir, la valeur de l’offre, etc.

-Qu’est-ce qui le conduit à l’action : les soutiens nécessaires, les moyens, les circonstances, l’urgence, etc.

-Qu’est-ce qui l’incite à l’intégration du nouveau dans son travail : l’essai satisfaisant, la confiance en l’offreur, etc.

-Qu’est-ce qui le conduit à la rétention du nouveau : la commodité d’utilisation, la maîtrise de l’utilisation, etc. 

1.1.3. Exemples de personas.

Voici le résultat auquel il faudrait aboutir après entretiens de vérification avec les personnes concernées.

On a retenu ci-dessous, deux personnes qui collaborent à la réalisation d’un type de tâche ; ici, un manager de RH et un manager fonctionnel qui a besoin de recruter.

Helen, le manager RH.

Helen travaille dans les RH depuis plus de 10 ans. Elle est responsable du recrutement de 6 à 12 nouveaux collaborateurs par an et sélectionne 25 à 50 candidats pour chaque poste.

Elle connaît son métier mais elle n’est jamais à l’aise devant les demandes de techniciens faites par ses clients internes, les managers fonctionnels. Les opérations courantes de son métier l’absorbe beaucoup alors qu’elle aimerait beaucoup mieux aider les managers techniques à rédiger la description du poste, à identifier les canaux de recrutement et à effectuer la sélection initiale des candidats.

Aujourd’hui, c’est le manager fonctionnel qui lui donne la description du poste lorsqu’il s’agit de qualifications spécifiques. Mais pour présélectionner elle est obligée de recourir aux références citées par le candidat pour évaluer les compétences de ce dernier et elle sent que le système fonctionne mal. De son point de vue, elle devrait disposer d’un moyen plus systématique de définition des compétences techniques pour présélectionner les candidats et transmettre les informations de présélection validées au responsable fonctionnel.

Elle voit les dommages que produit chaque embauche mal préparée et ne se sent pas capable d’éviter cela.

Elle se sent très mal chaque fois qu’un recruté doit partir et voit la démotivation de ses collègues.

Elle pense que le processus d’embauche doit être amélioré mais ne trouve pas d’appui auprès des managers fonctionnels.

Frank, le gestionnaire fonctionnel.

Frank est responsable technique depuis 8 ans. Il a commencé comme technicien, puis a dirigé un groupe d’opérateurs techniques puis est devenu responsable d’une équipe de développement de produits.

Il a bien géré son équipe mais il passe encore la plupart de son temps à interagir avec ses clients internes que sont les autres départements.

Il sait que le recrutement est l’un des facteurs de succès de son équipe mais consacre à cet aspect de son travail beaucoup moins de temps qu’il ne le souhaite.

Concernant les embauches, son travail consiste à rédiger une description de poste pour Helen la directrice des RH et à collaborer à la sélection des candidats. L’étude des CV et la sélection des candidats lui prenant beaucoup de temps, il tend à retarder les entretiens avec les candidats et le recrutement et se sent mécontent de cela.

Par ailleurs, de mauvaises embauches se produisent, ce que Frank n’aime pas du tout.

Il pense que lui et son équipe devraient avoir la capacité de sélectionner les meilleures nouvelles recrues et que lui serait utile un outil qui l’aiderait à définir les compétences nécessaires critères de recrutement. Et plus généralement Frank aimerait avoir une vision plus systématique de la situation de son équipe en matière de compétences clés.

 

On voit que les personas campent bien les personnes et leur travail et utilisent bien l’outil « pense, voit, ressent et fait » pour faire ressortir le problème principal que ces deux personnes rencontrent, le besoin principal qu’elles éprouvent et les « mauvaises » solutions dont elles disposent à ce jour.

 

1.2. Le scénario de problème.

https://www.alexandercowan.com/needfinding-problem-scenarios/

Le schéma ci-dessous donne une bonne idée de l’objectif à atteindre : découvrir le problème principal du prospect visé, l’écart entre le vécu et le voulu tel qu’il est exprimé par le prospect lui-même et se poser des questions sur la pertinence de son offre.

Les personas ci-dessus montrent qu’ils ont besoin d’un outil de recrutement très spécifique et c’est ce type d’outil qu’il faut proposer si on veut que « AIDA.OR » fonctionne et qu’ils deviennent clients.

Scénario de problème

 

La recherche du persona conduit à mieux comprendre le problème principal du prospect (problem scenario) et les solutions auxquelles il recourt (alternatives) et à se poser des questions sur la pertinence de son offre.

Helen a besoin de sélectionner les candidats selon des compétences techniques spécifiques afin de n’envoyer à Frank que des recrues ayant ces compétences.

Pour le moment, elle se contente de la liste donnée par Frank et, pour évaluer les candidats, elle appelle les références citées par eux ou les croient sur parole.

Frank a peu de temps et trouve difficile de définir toutes les compétences techniques pertinentes. Pour le moment, il fait au mieux.

Il est clair que l’offre nouvelle doit apporter une solution nouvelle efficace et utilisable par les personas pour attirer l’attention, etc.

 

  1. Conception et hypothèses testables de l’offre (Proposition de valeur)

https://www.alexandercowan.com/creating-a-lean-startup-style-assumption-set/

 

Méthode scientifique et Lean Startup doivent guider la démarche de conception d’une offre nouvelle comme le montre les schémas suivants :

La démarche comporte 6 étapes.

1.Le processus de conception part toujours d’une première idée plus ou moins intuitive de l’offre et du destinataire possibles. On sait qu’alors l’essai de rédaction d’un persona et celui de la définition d’un scénario de problème peuvent clarifier la vision et amorcer la découverte des hypothèses admises.

2.Une réflexion approfondie doit repérer les hypothèses précises à tester : sur le persona, sur le problème, sur la pertinence de l’offre.

La phrase suivante doit servir de guide ; tels prospects existent (persona) et éprouvent telles difficultés à réussir (scénario de problème) en utilisant tels moyens (alternatives) ; si l’offre nouvelle en cours de conception leur est proposée, alors ils pourraient réagir de telle manière (à définir).

3.Une recherche soigneuse doit être faite du ou des moyens les moins coûteux de prouver la validité des hypothèses admises : sur l’existence des prospects visés, ; sur le ou les personas ; sur les scénarios de problème ; sur la pertinence de l’offre, c’est-à-dire sur la capacité d’attirer des prospects.

4.La vérification des hypothèses doit être faite au moindre coût, en particulier celle de la pertinence de l’offre prévue et celle du nombre de prospects intéressés.

Concernant la pertinence de l’offre, créer l’offre prévue pour la tester pourrait être beaucoup trop coûteux et risqué et il n’est même pas sûr qu’un prototype soit nécessaire. A ce stade de la conception, il faut trouver le produit minimum viable (en anglais= MVP minimum viable product), moyen de permettre aux prospects de vivre l’expérience de l’utilisation de l’offre nouvelle et d’en tester la pertinence et ce au moindre coût.

Concernant la capacité d’intéresser des prospects, l’idéal est de trouver un prospect qui accepte de devenir une référence publiable ; on peut aussi tenter une petite campagne de publicité et compter les clics, inviter à visiter une page de démonstration, etc….

5.Selon les résultats des tests, la décision doit être prise de poursuivre la conception ou de « pivoter ».

6.Si les vérifications sont encourageantes ou mieux si un client ou des prospects ont été conquis et ont pris des engagements d’achat, il faut commencer à considérer comment « industrialiser » et vendre en nombre.

Les critères suivants pourraient servir de contrôle des hypothèses ;

Concernant l’hypothèse de persona :

-Ce persona existe-il en nombre suffisant ; est-il identifiable ; accepterait-il un entretien de découverte ?

-La compréhension du persona est-elle suffisante ? Compréhension de ce qu’il pense, voit, ressent et fait ; de ce qu’il fait et cherche à faire mieux ; de quels objectifs il poursuit, de comment il décide, etc.

Concernant l’hypothèse de problème :

-Le problème principal est-il identifié et défini en quelques mots ?

-Les insuffisances des outils actuels sont-elles repérées ?

Concernant l’hypothèse de proposition de valeur

-Les tests prévus sont-ils pertinents et au moindre coût ?

-Quels critères retenir pour établir la validation ou la nécessite de revoir (pivoter) ?

 

Aucune reproduction ne peut être faite de cet article sans l’autorisation expresse de l’auteur ».  A. Uzan. 2/01/2021