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Rénover le recrutement est le sujet traité par plusieurs cabinets d’experts. Nous en avons retenu deux :

Gartner pour son analyse de la situation et ses propositions de stratégies ;

Coursera pour le repérage des compétences qui ont tendances à être les demandées.

Ni l’un ni l’autre de ces cabinets ne peut être suspecté d’amateurisme ; il faut donc, au moins, connaître leurs réflexions et leurs résultats.

Nous présenterons successivement l’analyse et les résultats de chaque Cabinet avant de tenter une brève synthèse.

 

  1. Gartner : « Faire progresser le recrutement en période d’incertitude »

https://www.gartner.com/en/human-resources/trends/advancing-recruitings-value-through-uncertain-times

NB : Ces résultats sont issus d’entretiens qualitatifs avec plus de 70 entreprises. Ont été consultés 3 500 chargés de recrutement, 70 cadres de recrutement et 3 000 candidats à l’emploi.

1.1. Les changements qui affectent le recrutement

Le recrutement traditionnel, centré sur la reconduction des compétences du personnel parti, tend à devenir, aujourd’hui, obsolète et doit être rénové.

Les méthodes de recrutement traditionnelles reposent sur trois hypothèses :

– il est recouru aux bassins traditionnels de talents ;

– l’attraction des candidats s’opère essentiellement par le salaire et les avantages sociaux ;

-les chargés de recrutement choisissent « qui » recruter.

D’importants changements remettent en question ces hypothèses conduisant à rénover le recrutement.

-Les bassins de compétences sont devenus multiples : l’apprentissage (en écoles, dans l’entreprise et les organisations professionnelles) et, surtout, les moyens nouveaux et accélérés d’acquérir des compétences essentielles (certification en ligne ou développement des compétences en entreprise) se sont développés et la pandémie a accéléré le processus donnant aux travailleurs l’autonomie dans le développement de leurs compétences en dehors de leur travail quotidien.

L’attraction traditionnelle des talents ne correspond plus aux attentes des candidats. Les candidats s’attendent de plus en plus à ce que les entreprises leur offrent non seulement une rémunération compétitive et des avantages sociaux, mais aussi une expérience convaincante. Ils désirent plus d’influence et de contrôle sur leur travail, y compris comment, quand, où et avec qui ils le font.  En fait, 42 % des candidats s’attendent à influencer la conception de leur emploi. Le travail à distance a accéléré ce macro-changement en habituant les candidats à concevoir leurs propres expériences. Les candidats peuvent être réticents à renoncer à cette nouvelle autonomie, même s’ils finissent par retourner au bureau.

-De plus, l’intérêt des propositions de valeur aux candidats (EPV= Employee Value Proposition ou Proposition de Valeur pour les Employés. C’est tout ce qui est offert par un employeur pour attirer et retenir les talents) s’est accru à mesure que les candidats examinent les réponses des organisations à la pandémie. Les candidats cherchent à voir comment les entreprises ont aidé les employés quant à l’équilibre travail-vie personnelle, au passage au travail à distance, aux précautions de sécurité sur l’emploi et à la santé physique et mentale globale. Les recruteurs qui comptent pleinement sur leurs incitations habituelles à attirer les talents rencontrent beaucoup de difficultés.

Ainsi l’automatisation et le passage au travail à distance ont bouleversé le recrutement. Les employeurs sont obligés de réfléchir à une meilleure façon de réaliser leurs objectifs et aux compétences que doivent posséder leurs employés.

Les chargés du recrutement voient se réduire les occasions de recruter et on sait que moins ils recrutent plus la qualité de leur recrutement baisse.

Rénover le recrutement conduit à agir sur trois plans :  les méthodes de travail des chargés du recrutement, les sources de recrutement, l’attraction des talents.

1.2. Les méthodes de travail des chargés du recrutement

Pour façonner efficacement la main-d’œuvre nécessaire et mettre en œuvre ces nouveaux recrutements, les méthodes de recrutement doivent marquer trois changements clés :

-Définir d’abord les besoins en compétences et talents plutôt que les profils d’embauche ;

-Exploiter l’ensemble du marché des compétences au lieu de cibler les viviers de talents connus ;

– Attirer et retenir les talents en créant des EVP nouvelles.

1.3. Les méthodes de recrutement

Les managers et chargés de recrutement ne doivent plus se concentrer sur la définition du type de personne à embaucher mais sur le travail à faire et les compétences nécessaires. Les deux fonctions, manager et chargé de recrutement, doivent collaborer pour définir et trouver la meilleure des solutions pour combler les lacunes critiques en matière de compétences.

Les chargés de recrutement doivent réaliser le lien entre la stratégie globale de l’entreprise et les besoins de compétences et pas seulement chercher à combler le manque de personnel dans telle ou telle unité de l’entreprise.

1.4. Les sources de recrutement

Les compétences ne sont plus exclusivement détenues par des personnes ayant des titres scolaires ou universitaires. On peut en trouver aussi parmi les autodidactes ou parmi les salariés d’autres industries.

Une stratégie visant à repérer des compétences selon d’autres critères (par exemple : autodidactes, antécédents, expériences, etc.) ouvrent des marchés de compétences plus vastes. Les entreprises évalueront les possibilités de retenir des critères de recrutement plus flexibles en suivant les principes suivants :

-examiner le potentiel des candidats plutôt que les titres ;

-retenir des candidats ayant une expérience transposable plutôt qu’une expérience limitée à un domaine ;

-recruter là où se trouve le talent, et non là où se trouve l’entreprise.

1.5. Les moyens d’attirer des candidats (EVP).

(EPV : Employee Value Proposition (EVP) ou Proposition de Valeur pour les Employés. C’est ce qui est offert par un employeur pour attirer et retenir les talents)

Les responsables du recrutement ont traditionnellement tiré parti des moyens les plus attrayants mis en œuvre dans leur secteur d’activité.

Mais cette approche n’est pas suffisante car elle ne répond plus aux attentes des candidats.

Les entreprises qui cherchent à recruter des talents doivent repenser ce qu’elles ont à offrir. Les candidats y prêtent une attention particulière ; ils attendent d’avoir plus d’influence sur leur expérience professionnelle et sont à la recherche d’organisations qui répondent à ce besoin.

Pour répondre à ces attentes, les entreprises doivent évaluer et adapter leur EPV pour offrir l’expériences que les candidats apprécient.

 

En résumé, l’évolution des compétences nécessaires, la diversification des sources de compétences et les attentes des candidats, conduisent à rénover l’approches traditionnelle du recrutement.

Les managers et chargés de recrutement doivent collaborer davantage, recourir à toutes les sources de compétences et rénover leurs moyens d’attraction et de rétention des talents.

 

  1. Coursera : Les compétences professionnelles dont la demande croît le plus vite

https://www.coursera.org/business/ebook/job-skills-of-2022/

Il ne suffit pas de démontrer qu’il faut accroître et changer les compétences des salariés. Il faut aussi savoir quelles compétences manquent. Une idée de ces manques peut être induite de la demande de formation qui s’adresse à Coursera. Ce n’est qu’un indicateur mais qui peut servir de guide en attendant mieux.

L’approche des besoins est, ici, faite en repérant les compétences dont la demande des salariés d’entreprises auprès de Coursera croit le plus vite (entre 2020 et 2021)

L’étude de Coursera présente les principales compétences recherchées en distinguant compétences numériques et compétences humaines 

2.1. Les compétences numériques

L’Unesco définit ainsi ces compétences : « Eventail des capacités d’utiliser des appareils numériques et des applications de communication et réseaux, pour accéder à l’information et la gérer ». On sait que les besoins en ce domaine sont croissants, en particulier en entreprise.

Le tableau ci-dessous liste les 10 compétences numériques les plus recherchées et indique le changement de rang de chaque compétence entre le 1er octobre 2019 et le 1er octobre 2020.

Les compétences sont les suivantes :

-Conception de produit.

-Représentation graphique des données.

-Conception de l’expérience utilisateur.

-Visualisation des données.

-Stratégie de sécurité.

-Infrastructure cloud.

-Systèmes de chaîne d’approvisionnement.

-Média social.

-Gestion des opérations.

-Gestion de processus.

On peut les regrouper en 3 types de compétences.

2.1.1. La conception de produits et de l’expérience utilisateur.

La conception de produits arrive en tête des compétences numériques et des croissances de demandes ; et, avec la conception de l’expérience utilisateur (3eme place), ces compétences témoignent de la valeur croissante que les entreprises donnent aux interactions numériques avec les clients et à la différenciation de leurs offres.

La relation avec le client, la conception des produits et l’expérience utilisateurs sont devenues les moteurs principaux de la croissance. Et les entreprises ont besoin de perfectionner rapidement leurs collaborateurs en leur apportant une nouvelle expertise digitale dans des domaines tels que l’interface utilisateur, l’expérience utilisateur, les développements « front-end » (ce que voit l’utilisateur) et « back-end » (ce qu’a fait l’informaticien) et le service.

2.1.2. La gestion et la visualisation des données

Avec la croissance de la production de données, les compétences liées à la visualisation des données se sont beaucoup accrues ; en particulier la présentation des données (2eme place), la visualisation statistique (4eme place) le stockage et la gestion des données, la stratégie de sécurité (5eme place) et l’infrastructure cloud (6eme place).

Les données ne sont plus l’apanage des scientifiques et des professionnels de la technologie ; elles sous-tendent de plus en plus le travail dans tous les secteurs et rôles professionnels. 

2.1.3. La gestion des opérations et des processus.

Elle est toujours nécessaire mais se classe au dernier rang et progresse peu.

2.2. Les compétences humaines et sociales.

Le tableau ci-dessous liste les 10 compétences humaines et sociales les plus recherchées et indique le changement de rang de chaque compétence entre le 1er octobre 2019 et le 1er octobre 2020.

Les compétences sont les suivantes :

-Communication.

-Conduite du changement.

-Développement professionnel.

-Storytelling (narration).

-Planning.

-Exercice de l’influence.

-Prise de décision.

-Résolution de problème.

-Gestion des ressources humaines.

 

IL s’agit donc d’un ensemble de compétences cognitives, sociales et émotionnelles, indispensable dans tout milieu social et nécessaire pour utiliser de manière efficace et éthique les compétences numériques.

-Les compétences en matière de communication (1er place) et de narration (4em place) sont indispensables au partage de l’information entre les personnes qui doivent collaborer.

-Le storytelling est devenu un ingrédient clé du marketing et une technique publicitaire puissante.

-La capacité d’exercer l’influence est aussi une compétence clé dans l’entreprise. Cela se manifeste par la croissance des demandes de compétences en gestion du changement (2eme place), en développement professionnel (3eme place), en développement personnel (9eme place) et en gestion des ressources humaines (10e place).

-La demande de compétences en résolution de problèmes (8eme place) et en prise de décision (7eme place) sont plus classiques et progresse moins vite.

 

Ces deux études confirme qu’aucune carrière ne peut se dérouler sans changement de compétence. Dans le nouveau monde du travail, les institutions doivent promouvoir un état d’esprit d’apprentissage tout au long de la vie.

Le cabinet Deloitte fait les suggestions suivantes :

https://www2.deloitte.com/us/en/insights/focus/technology-and-the-future-of-work/importance-of-investing-in-employees.html

-créer un « diplôme pour les plus de 50 ans » ;

-instaurer pour les étudiants un « abonnement à vie » plutôt qu’une inscription annuelle à l’université, permettant d’entrer et de sortir des programmes de formation tout au long de la vie, pour acquérir les connaissances et compétences à mesure des besoins.

-développer « l’université expérientielle », permettant aux étudiants de mélanger la théorie et la pratique.

Sur le recrutement, on trouvera aussi les articles suivants :

https://outilspourdiriger.fr/reussir-le-recrutement/

https://outilspourdiriger.fr/les-criteres-qualitatifs-de-recrutement/

https://outilspourdiriger.fr/les-incertitudes-du-recruteur/

https://outilspourdiriger.fr/le-recruteur-juge-ou-client/

https://outilspourdiriger.fr/les-outils-du-recruteur/

 

Aucune reproduction ne peut être faite de cet article sans l’autorisation expresse de l’auteur.  A. Uzan 22/01/2022