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André Uzan

Ancien universitaire

Créateur d’entreprise

  Cet article est extrait d’un guide à paraître intitulé  « Réussir sa création d’entreprise »

  1. Le pari

Avoir une idée de l’entreprise à créer est une condition nécessaire mais non suffisante de la décision de créer. Avoir une idée du produit ou du service à offrir, c’est, au mieux, avoir un ensemble d’hypothèses sur la relation entre les actions envisagées et les résultats espérés. En effet, créer une entreprise, c’est d’abord consacrer beaucoup de temps, d’efforts et d’argent à mettre en place une capacité de production (local, machines, personnel..), à choisir des fournisseurs, à mettre au point la production, à attirer des clients toujours sollicités par la concurrence, etc. ; et tout cela avant même de pouvoir percevoir les premiers encaissements et sans assurance aucune que les clients viendront en nombre suffisant Créer une entreprise,  c’est, donc, engager un pari  qui peut être gagné ou perdu et qui, dans ce dernier cas, peut engendrer de lourdes conséquences financières et humaines.

  1. Les attitudes face au pari.

Face à ce pari, à ce choix à faire dans l’incertitude, il n’y a que deux solutions – suivre son désir et son intuition : se lancer, créer la situation choisie ; en comptant  sur son énergie pour adapter la situation à son désir et sur sa plasticité pour s’adapter à la situation; – réunir les conditions nécessaire à la prise d’un risque calculé : réduire l’incertitude autant que possible en vérifier les hypothèses ; tenter de savoir si le projet « vaut la peine  » et, au moins, de savoir à quelles conditions le pari peut être gagné et ce qui peut le faire perdre ! La première attitude est, de loin, la plus dangereuse ; elle revient à prendre sa décision « les yeux fermés » ou « au doigt mouillé ». La deuxième attitude est la plus difficile à mettre en œuvre et la plus coûteuse en temps et en argent dans un premier temps; mais c’est celle qui, en fin de compte, est la plus intelligente et la plus avantageuse, pour les raisons suivantes :

  • Avoir une indication même sommaire des effets possibles d’une décision permet de prendre cette décision en incontestable meilleure connaissance de cause qu’en l’absence de toute indication.
  • Seule une exploration des relations entre moyens d’action et résultats permet de repérer les conditions principales du succès et les facteurs principaux de l’échec.
  • Les partenaires potentiels du créateur prendront toujours en compte l’intuition et les qualités du candidat mais ne s’en contenteront jamais et n’accorderont leur soutien que s’ils ont une claire vision des risques du projet.
  • Et même si la préparation conduit à l’abandon du projet, les pertes encourues par le créateur seront faibles et il aura appris à mieux préparer un autre projet éventuel.
  1. Les hypothèses critiques.

En l’absence d’obstacle juridique, réglementaire ou technologique, on sait que les difficultés initiales principales ne tiendront pas à l’équipement, au personnel ou aux achats mais au financement et à la rentabilisation des moyens engagés. C’est donc d’abord les deux hypothèses critiques suivantes qu’il faut impérativement vérifier:

  • Celles relatives aux ventes : Quelles quantités de produits sera-t-il possible de vendre et à quel prix ? Les chiffres d’affaires possibles peuvent-ils assurer la viabilité puis la croissance ?
  • Celles relatives au financement : puis-je réunir les capitaux nécessaires au lancement puis au fonctionnement courant de l’entreprise ? Pourrais-je rembourser les emprunts nécessaires ?
  1. Les explorations à conduire

En fait les explorations à conduire sont plus nombreuses et plus complexes. Vérifier l’hypothèse relative aux ventes peut conduire à découvrir qu’il faut changer plus ou moins le produit initialement prévu si on veut le vendre en quantité suffisante et donc changer aussi les équipements. D’autre part, chercher à utiliser à plein la capacité de production pour avoir le coût le plus faible peut conduire aussi à changer plus ou moins le produit initial. Enfin les problèmes de financement peuvent remettre en question, plus ou moins, toutes les prévisions précédentes. Bref, vérifier la validité de mon idée de départ, c’est donc explorer l’hypothèse admise pour chacun des éléments qui constitue le processus de l’entreprise et prendre en compte le fait que ces éléments sont interdépendants. Finalement, préparer la création d’une entreprise, c’est bâtir un projet à partir d’une idée ; c’est construire une prévision cohérente pour l’ensemble des éléments interdépendants. Il ne s’agira pas de chercher des certitudes qui sont totalement hors de portée, mais d’avoir des ordres de grandeurs à partir desquelles je puisse dire : « c’est impossible ! », « c’est jouable ! »,  » ce n’est possible que si..!  » Chercher à obtenir ces ordres de grandeurs exige une méthode d’approche et des outils d’analyses et de prévisions adaptés.

  1. Les méthodes nécessaires à cette exploration

Elles conduisent à utiliser la prévision, la simulation et l’itération Prévoir, c’est tenter de percevoir ce que peuvent être les effets futurs possibles ou probables d’une action. Simuler, c’est prévoir sur la base d’une hypothèse: si je vends X produits, quelles seront les conséquences ? Ainsi pour l’élaboration d’une décision simple, on peut partir de quelques hypothèses, explorer les effets possibles de chacune et choisir selon ses objectifs.             Le schéma 1 ci-dessous « visualise » la démarche Idee.1 – Mon problème = prendre une décision ; par exemple, choisir entre les actions. – Traduire le problème en questions conduit à définir les objectifs et les contraintes à satisfaire – Explorer les « notions et outils » (Boite à outils) revient à repérer quels concepts et outils utiliser pour repérer les effets connus des actions ? –  Quelle est la validité de mes réponses au regard du problème initial ? –  Le problème doit-il être formulé autrement ? La démarche est « balisée » par les flèches mais on peut être conduit à refaire plusieurs fois le parcours ci-dessus et à reformuler le problème pour tenir comptes des solutions possibles. Un tel schéma peut être adopté pour construire chacun des aspects de mon projet séparément : la commercialisation, la production et le financement. Mais l’interdépendance entre les éléments du projet exige de plus une autre méthode : l’itération. Une fois prévu chaque aspect du projet, je vais devoir rechercher par itération la meilleure adéquation entre eux. Procéder par itération  (cheminement), c’est rechercher une solution par approximations successives: par exemple, on part d’une hypothèse de production pour prévoir le coût de revient et le prix de vente mais, si à ce prix on prévoit ne pas pouvoir vendre toute la production, il faut revenir en arrière pour changer la production et/ou le prix, etc.,  jusqu’à trouver la meilleure correspondance possible. Le schéma 2 ci-dessus « visualise » la démarche à adopter pour construire son projet  Idee   On commence par le bloc 1 « Capacité et coûts de production, en faisant une hypothèse sur le bloc 2  « Ventes et coûts de commercialisation », puis on passe au bloc 2 et on finit par le bloc 5 « Validation ». Mais dès l’examen du bloc 2, on peut être conduit à rectifier le bloc 1 pour tenir compte de ce qu’il est possible de vendre et, éventuellement, revenir sur le bloc 2 pour modifier le produit, etc. jusqu’à trouver le bon équilibre. Mais même après cet « équilibrage », il se peut que le blog 3 « Rentabilité et financement » nous oblige à tout revoir. Il se peut, aussi, que le bloc 4 impose des changements sur tout ou partie des autres blocs. La prévision, la simulation et l’itération sont les méthodes de base à utiliser pour trouver la combinaison optimale des choix à faire et offrir donc au candidat créateur le moyen de décider de créer ou pas en la meilleure connaissance de cause possible.

Aucune reproduction ne peut être faite de cet article sans l’autorisation expresse de l’auteur ».  A.Uzan.6/01/2013