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Le numérique : une innovation de rupture, l’affirmation n’est pas contestable.

Il a produit et continue de produire une série de processus d’innovation du type suivant : un concurrent, a priori inoffensif, s’introduit dans un marché stabilisé. Il mise sur de nouveaux attributs particulièrement valorisés par certains clients, et sacrifie des attributs que l’on croyait indispensables. Il peut ainsi retourner tout un marché s’il parvient à modifier massivement les préférences d’achat.

 

Voyons les facteurs du développement du numérique, le modèle d’affaire qu’il instaure, le changement de mode de concurrence qu’il introduit, le nouveau mode d’entreprendre qu’il impose.

 

  1. Les facteurs du développement du numérique.

 

La numérique a favorisé l’innovation de rupture pour les raisons principales suivantes :

 

-Les avantages offerts par la dématérialisation font facilement oublier certains luxes auquel on était habitués.

Par exemple abandon du CD, adoption d’internet, l’adoption de l’imprimante normale ou 3D.

L’appropriation du produit nouveau est plus facile.

-Le produit disruptif peut facilement être testé, gratuitement ou au moindre coût, avant la création ou l’achat.

-La diffusion de ce type d’innovation bénéficie des nouvelles formes de prescription numérique.

-La promotion du produit nouveau sur les réseaux sociaux est beaucoup plus efficace que la promotion habituelle et la taille des marchés ouverts permet au produit nouveau d’atteindre rapidement la taille critique.

-On le sait depuis Schumpeter, le « disrupteur » est l’entrepreneur, le créateur de startup ; les effets de ses innovations transforment l’ensemble de l’économie, voire l’ensemble du système capitaliste.

-Des lieux de rencontre et d’essai permettent d’échanger des idées et des compétences mais aussi de réaliser des prototypes de produit.

Les Fablab sont partout dans le monde (espace collaboratif qui met à disposition des utilisateurs des outils de fabrication numérique et réunit des experts divers).

Les Techshop mettent à disposition de manière payante, des matériels hautement performants pour fabriquer des produits de gabarit industriel.

-Des « biens communs » numériques se sont développés ; Internet, les logiciels open source, etc.

-Des externalités servent de leviers puissants.

Une externalité est le bénéfice ou la perte qu’un agent économique encourt du fait de l’activité d’un autre agent économique, sans qu’il y ait aucune interaction économique entre eux.

Le monde numérique se nourrit d’externalités. Plus il y a d’abonnés à un réseau, plus chacun aura de correspondants. Plus il y aura de recherches effectuées sur un moteur, plus l’algorithme de ce moteur pourra être amélioré.

Le numérique a généré de multiples plateformes aux effets externes extrêmement puissants. Ces plateformes se développent comme espaces de mise en relation entre deux versants ou faces d’un marché, en créant des algorithmes de rencontre, de fréquentation et de transaction très élaborés qui renforcent ces externalités, c’est-à-dire l’interdépendance des utilités.

 

  1. Le modèle d’affaire (« business model ») qu’il instaure.

 

Les modèles numériques sont très différents des modèles industriels classiques. Ils sont faits de plusieurs acteurs (« faces ») ; par exemple les clients et les fournisseurs, les clients et les annonceurs et on peut, par exemple, ne rien faire payer au client mais faire payer les annonceurs qui les prospectent.

En fait et de façon quasi générale chaque nouvel utilisateur d’une plateforme numérique ne coûte rien et la gratuité provoque une viralité qui diffuse la marque en attirant de nouveaux utilisateurs.

Des entreprises comme Google ou Facebook proposent tous leurs services gratuitement au grand public, car ils bénéficient au maximum de leur position de prescripteur d’achat aux yeux des prospecteurs.  Ils se rémunèrent largement sur les prospecteurs ou les entreprises qui veulent vendre via leur plateforme.

Il se peut aussi qu’il soit avantageux de donner à ses fournisseurs et partenaires et faire payer les clients.

 

Ces nouveaux modèles d’affaire menacent les acteurs en place et peuvent rapidement les dépasser.

Ce jeu de complémentarité a joué dans le monde des services mais peut aussi intervenir dans le « hardware ».

Google diffuse gratuitement son standard Android Auto sur les ordinateurs de bord du monde entier, mais il peut exploiter la masse d’informations captées par ou dans les véhicules

 

Des réactions à ce modèle se font jour.

Le tout gratuit séduit mais l’exploitation commerciale des données personnelles provoque de plus en plus de méfiance et de résistance, ce qui ouvre de nouveaux créneaux pour les entreprises qui se privent de cette externalité.

Les clients des plateformes souhaitent de moins en moins être pieds et poings liés à un seul standard.

 

En résumé, vu du monde pré-numérique, tout cela est très étrange. Il devient rentable d’offrir gratuitement des choses qui ont coûté très cher à développer.

Telle est la nouvelle loi des modèles d’affaire du numérique. Investir sur une face du marché génère des effets d’entraînement sur les autres faces. Tout l’enjeu est de savoir les exploiter.

 

  1. Le changement de mode de concurrence qu’il introduit.

 

Michael Porter a théorisé un modèle de résistance à la concurrence. Pour cela, l’entreprise doit accumuler des actifs, des brevets, et une image de marque comme barrières à l’entrée du marché.

La révolution numérique a balayé ce principe. Les produits installés se font rapidement copier, ou deviennent obsolètes. Les technologies progressent à un rythme exponentiel et se combinent. Les brevets sont contournés ou dépassés. Bref, aucun avantage compétitif n’est durable.

Dès lors, la stratégie de concurrence ne consiste plus à fixer un cap et à s’y tenir. Elle doit en permanence lancer de nouvelles offres et renouveler ses actifs.

Le numérique ouvre des possibilités inédites de lancer de nouveaux produits :

– il n’y a pas de barrières à l’entrée ;

– les coûts de développement sont réduits par la CAO, l’open innovation, ou les services cloud.

– chaque lancement est plutôt sécurisé car il peut être testé auprès de clients.

 

Une fois un premier succès acquis, le numérique permet de modifier rapidement la stratégie.

On peut ainsi facilement adapter des versions ultérieures d’une innovation, en se basant sur les opinions et les usages effectifs des clients.

Chaque mois s’ouvre pour le numérique un nouveau marché à préempter.

Par exemple, la mobilité partagée, la maison automatisée, la santé connectée, ou la réalité virtuelle. Une entreprise peut en quelques mois imposer sa notoriété sur ces nouveaux territoires.

Construire des actifs, puis les exploiter en fonction des opportunités. Ce n’est pas un hasard si l’audience ou le nombre d’utilisateurs fidèles est un indicateur clé à l’ère du numérique. C’est un actif qu’il s’agit de développer en priorité, quitte à perdre de l’argent. On verra ensuite avec quelles offres on peut monétiser tout cela.

Ce sont les ressources et les compétences de l’entreprise qui lui permettent de faire ce qu’elle fait mieux que les autres.

 

  1. Le nouveau mode d’entreprendre qu’i impose.

 

4.1 De la stratégie prédictive à la stratégie « effectuale ».

La stratégie prédictive est celle qui a été théorisée par M. Porter et qui continue de prévaloir dans le monde industriel : on se fixe un but et on réunit et optimise les moyens de l’atteindre.

« L’effectuation » est un autre type de stratégie, un peu marginale dans le monde industriel, mais devenue exclusive dans le monde numérique.

Elle ne part pas d’un but précis à atteindre ; elle commence par recenser les moyens disponibles (Qui suis-je ? »

« Que sais-je faire ? » « Qui connais-je qui peut m’aider ?» et à monter son projet avec ces moyens.

Elle voit l’entreprise comme un « patchwork » qui s’assemble progressivement en fonction des ressources.

Un autre principe important guide son action ; s’il y a risque d’échec, il faut s’arrêter le plus tôt possible pour repartir dans une autre direction.

Le facteur clef de succès des start-ups du numérique est le client. Il faut aller vers lui avant même d’avoir conçu son produit. Et définir quel prospect servir car la startup n’a pas les moyens de les satisfaire tous.

La simplicité d’un produit est un atout majeur car elle facilite l’acquisition d’utilisateurs sur la base de messages intelligibles et rapidement assimilables par les clients.

Finalement les entrepreneurs ne doivent pas s’inspirer que des bonnes pratiques de leur domaine mais accepter toutes des exceptions. La saveur et le risque de l’entrepreneuriat digital sont que personne ne peut prédire avec certitude le succès.

 

4.2. De la culture des idées à celle de l’exécution.

Les idées géniales ne viennent pas comme par magie. Le plus souvent il faut faire des réajustements majeurs au produit initial, après des tests et des échanges avec d’autres experts.

C’est cette exécution qui détermine l’adhésion des fonds d’amorçage à une entreprise numérique ?

Personne ne sait prévoir le futur des start-ups en situation d’amorçage. Y compris les acteurs les plus informés, puisque le taux de rentabilité moyen des fonds d’investissement en « early stage » est négatif.

Il n’en reste pas moins que les fonds d’amorçage continuent d’investir plusieurs milliards d’euros partout dans le monde et tous les ans.

Si les entrepreneurs souhaitent lever des fonds, ils doivent donc bien comprendre les attentes des investisseurs.

L’erreur de beaucoup d’entrepreneurs consiste à utiliser un argumentaire théorique pour essayer de convaincre les investisseurs de la pertinence de leur idée. Cette manière est désormais révolue. Les entrepreneurs ne doivent donc pas se méprendre sur la nouvelle rationalité des fonds d’investissements.

Les fonds en amorçage n’exercent pas un métier de croyance. Les fonds d’amorçage prennent des décisions dans un environnement qu’ils savent particulièrement incertain. Ils attendent donc des start-ups qu’elles leur fournissent des faits tangibles leur permettant de réduire le niveau d’incertitude associé à leur investissement.

Autrement dit, un investissement reste un pari sur l’avenir. Mais les entrepreneurs doivent comprendre que la meilleure façon de convaincre un investisseur en « early stage », c’est de « ramener le futur au présent ». Les promesses doivent donc se fonder sur des faits tangibles et observables aujourd’hui.

Les fonds d’amorçage exigent un prototype. Ce prototype n’est pas seulement utile pour représenter le produit, il est surtout la preuve d’une compétence des fondateurs à exécuter leurs start-ups.

Les investisseurs attendent des entrepreneurs des mesures convaincantes témoignant de l’adhésion des clients à la solution proposée par la start-up. Par exemple, si vous souhaitez lever des fonds sur une application mobile, vous devrez pouvoir rendre compte d’informations précises sur l’adhésion des premiers utilisateurs.

Il faut donc montrer aux investisseurs l’analyse des prospects associés à votre application. Elle leur donnera ainsi des renseignements sur l’activité de vos clients avec votre produit, en fonction de la date à laquelle ils l’ont téléchargé. Autrement dit, pour maximiser les chances de lever des fonds, il faut être capable de montrer, en situation réelle d’acquisition clients, des indicateurs clés de performance supérieurs aux concurrents de la filière.

 

Source : https://www.coursera.org/specializations/digital-business

https://www.coursera.org/learn/understanding-digital-world?specialization=digital-business

 

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https://outilspourdiriger.fr/linnovation-de-rupture/

 

 

Aucune reproduction ne peut être faite de cet article sans l’autorisation expresse de l’auteur.  A. Uzan. 26/10/2025

 

 

 

 

Mots clés :

 

 

Résumé :

 

 

 

Le numérique : une innovation de rupture

Le numérique a produit et continue de produire une série d’innovations de rupture. Les facteurs de son développement sont nombreux. Il instaure un nouveau modèle d’affaire, change le mode de concurrence, impose un nouveau mode d’entreprendre.

 

https://outilspourdiriger.fr/le-capital-humain-facteur-du-developpement-de-lentreprise/

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