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André Uzan

Ancien universitaire

Créateur d’entreprise

Formation du personnel et rentabilité, selon McKinsey Formation du personnel et rentabilité, selon McKinsey

 

Formation du personnel et rentabilité , quels rapports entre ces deux notions ? Y a-t-il une relation positive de cause à effet entre formation du personnel et rentabilité , la formation développant les résultats financiers ? La relation est-elle négative, la formation réduisant la rentabilité ? Les deux notions sont-elles déconnectées ?

Telles sont les questions qui ont conduit une grosse équipe de McKinsey à entreprendre l’analyse de 1 800 grandes entreprises, de 15 pays et appartenant à tous les secteurs, et à les examiner selon deux critères : la mesure dans laquelle l’entreprise se concentre sur le développement de ses collaborateurs (ou capital humain) et la mesure dans laquelle elle réalise des résultats financiers supérieurs à ses pairs du secteur.

Les résultats montrent qu’entre formation du personnel et rentabilité le lien entre les deux notions n’est pas direct mais qu’un autre facteur est décisif.

 

Nous verrons d’abord les résultats de l’enquête, puis le lien entre formation et rentabilité, puis le groupe le plus performant, enfin le rôle du capital organisationnel.

 

  1. Les résultats de l’analyse.

Cette analyse a conduit à découvrir quatre types d’entreprise au regard du problème étudié, comme l’indiquent les schémas ci-dessous :

Types d'entreprise selon McKinsey

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le premier type d’entreprise, appelé « Performance-Driven Compagnies », est principalement centré sur les résultats financiers. On voit, par comparaison avec les autres types que son taux de profits (28%) et son profit sont élevés mais son taux de départ de l’entreprise est fort (12%) et la promotion interne est faible (27%).

Le deuxième type, « People and performance Winners », centré sur le développent du personnel et les résultats financiers, est le plus remarquable. Son taux de profit est équivalent à celui du groupe précédent mais son taux de départ est nettement plus faible, son taux de promotion interne nettement plus fort et son taux de résilience nettement plus fort.

Le troisième groupe, « People-Focused Compagnies », centré principalement sur le développement du personnel, a un taux de profit nettement plus faible mais un taux de départ très faible et un taux de promotion interne élevé.

Le quatrième groupe, « Typical performers » est composé de la majorité des entreprises étudiées. Il montre un taux de profits plus faible que les autres groupes ; un taux de départ de l’entreprise élevé et un taux de promotion interne plus faible.

 

  1. Le lien entre formation et rentabilité.

On voit qu’un lien clairement positif entre formation et résultats financiers ne s’observe que dans le groupe « deux ».

Le groupe « trois » ne parvient pas traduire la formation en résultats financiers et le groupe « un » produit des résultats financiers sans effort particulier sur la formation.

Les recherches antérieures du « McKinsey Global Institute » ont montré que le développement du capital humain est payant pour les travailleurs mais profite-t-il aussi aux entreprises ? La plupart des chefs d’entreprise conviennent que c’est la bonne chose à faire. Mais ils sont moins clairs sur la façon dont leurs efforts sont liés au résultat net et sur les raisons qui font que certaines entreprises sont beaucoup plus efficaces que d’autres pour transformer le capital humain en un réel avantage concurrentiel

Sur ce terrain, un sous-ensemble particulier se démarque : « People and Performance winners » excellent à créer pour leurs employés des opportunités d’acquérir des compétences (mesurées par la mobilité interne, les heures de formation et les scores de santé organisationnelle) tout en franchissant constamment la barre la plus haute pour la performance financière. Ces entreprises donnent la priorité au développement de leurs employés et parviennent en même temps à s’offrir une rentabilité de premier plan. Elles sont plus susceptibles de devenir des « superstars » à grande échelle. Elles existent dans tous les secteurs.

Un autre groupe, « Performance-Driven Compagnies » obtient également des résultats financiers de premier plan, mais ne met pas le même genre d’accent sur le développement des compétences et sur l’environnement de travail.

Un troisième groupe, « People-Focused Compagnies » investit des ressources dans le perfectionnement des employés, mais n’est pas en mesure de traduire cela en solides résultats financiers.

Enfin, la majorité des entreprises sont des entreprises qui ne se démarquent sur aucune des deux dimensions retenues.

 

  1. Le groupe « People and Performance winners »

Ces entreprises se distinguent des entreprises axées sur la performance financière de deux manières importantes.

Elles obtiennent des résultats plus constants et ont une plus grande résilience en matière de revenus, et également, une capacité supérieure d’attirer et de retenir les talents. Ce sont des avantages importants à un moment où les entreprises sont confrontées à des vents contraires économiques et à des pénuries de main-d’œuvre.

Ces entreprises ne sont pas seulement cohérentes lors des hauts et des bas des cycles économiques ; elles sont également plus résilientes en temps de crise. Lorsque la pandémie a frappé, elles étaient plus susceptibles de surmonter la crise et d’éviter de subir des coups majeurs. Elles ont trouvé des opportunités de croissance dans les années de crise. De 2019 à 2021, leur chiffre d’affaires a augmenté deux fois plus vite que les entreprises axées sur la performance (8 % contre 4 %).

Ces entreprises qui ont passé des années à constituer les réserves de loyauté, de bonne volonté et de capacité d’innovation de leurs personnels, en investissant dans leur développement, ont peut-être eu plus de ressources internes sur lesquelles puiser lorsque la situation a été plus difficile.

Investir dans le capital humain est également associé à la cohérence et à la résilience pour d’autres entreprises.

Elles sont également des aimants à talents, avec des taux d’attrition inférieurs de près de cinq points à ceux des entreprises axées sur la performance financière. Leurs employés déclarent une plus grande satisfaction au travail et sont 1,3 fois plus susceptibles de passer à des tranches de revenus plus élevées que les employés des entreprises axées sur la performance.

Par comparaison, les entreprises « People-Focused Compagnies », axées sur les personnes, ont des niveaux élevés de satisfaction des employés et un taux d’attrition encore plus faible mais pas la même performance financière.

Cependant, ces entreprises ont fait preuve d’une plus grande stabilité que les entreprises du groupe « Typical performers ». Ces dernières entreprises ont été plus susceptibles que l’entreprise moyenne de l’échantillon de rester dans le quintile inférieur de rentabilité pendant neuf années sur dix, tandis que les entreprises axées sur les personnes résistaient mieux.

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  1. Le rôle du capital organisationnel

Comment les « People and Performance winners » parviennent-ils à réussir sur les deux fronts ?

Bien qu’il soit important d’investir dans les gens, les recherches de McKinsey montrent qu’un autre ingrédient est nécessaire pour faire ressortir le meilleur des employés et canaliser leurs efforts vers des résultats : le capital organisationnel, c’est-à-dire les pratiques, les systèmes et la culture de gestion au sein de chaque entreprise.

Ce concept englobe tout, des programmes de formation en passant par les structures de département et d’équipe, les communications avec les employés, les normes, la culture et le leadership. Lorsque ces éléments sont efficaces, ils peuvent transformer un groupe de personnes talentueuses en une équipe cohésive et productive.

Les « People and Performance winners » ont une signature organisationnelle distinctive qui met au défi et responsabilise les employés tout en favorisant l’innovation ascendante. Cette forme de capital organisationnel contraste avec celle d’autres entreprises très performantes, qui ont tendance à être plus descendantes et transactionnelles. Ce style de gestion semble activer le capital humain et créer un avantage concurrentiel tangible.

Le capital organisationnel est le tissu qui entoure les employés et son modèle est important.

Les « People and Performance winners » ont une signature distinctive caractérisée par des styles de leadership consultatifs et stimulants ; des innovations et des collaboration ascendantes; des milieux de travail positifs et inclusifs; et des possibilités de récompenses et d’avancement pour les employés (voir le tableau ci-dessous).

Les entreprises « Performance-Driven Compagnies » ,axées sur la performance financière, ont des styles de leadership similaires, mais sont davantage orientées vers l’extérieur, vers les clients et les concurrents, mettant moins l’accent sur l’engagement de leurs employés grâce à l’innovation, à la motivation, à l’environnement de travail et au coaching en cours d’emploi à l’échelle de l’entreprise.

Les entreprises « People-Focused Compagnies », axées sur les personnes ont de nombreuses pratiques en commun avec les « People and Performance winners » (la motivation des employés et la création d’environnements de travail positifs), mais elles sont moins axées sur les résultats financiers et ne mettent pas l’accent sur l’innovation ascendante.

Le tableau ci-dessous fait apparaître les différences de capital organisationnel :

Types de système organisationnnel

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les « People and Performance winners consacrent, en moyenne, environ un tiers de leurs revenus au capital humain et organisationnel (mesuré en utilisant l’approximation de la rémunération pour le premier et des dépenses de vente, générales et administratives ajustées pour le second). Il s’agit d’un investissement important, et les entreprises doivent le rendre aussi productif que possible. Ces entreprises réalisent un rendement des investissements faits dans le capital humain et organisationnel bien supérieur à celui des autres entreprises. En revanche, les entreprises axées sur la performance génèrent un retour sur investissement plus élevé en R&D, en ventes et en marketing, mais elles ont le potentiel d’améliorer encore leurs résultats globaux en rendant leurs investissements dans les ressources humaines et les systèmes de travail plus efficaces.

Les dirigeants d’entreprise doivent se concentrer davantage sur le capital organisationnel. Le capital humain n’est pas seulement un intrant de travail ; les personnes sont l’atout principal de toute entreprise. Le lieu de travail devrait fonctionner pour les employés, avec un encadrement pour les aider à se développer, des structures de soutien et des flux de travail qui éliminent les frustrations. Les employés savent ce qui fonctionne en première ligne, et leurs voix et points de vue devraient éclairer toute réforme. Au-delà de l’amélioration de l’expérience quotidienne des travailleurs à tous les niveaux, ces principes peuvent renforcer la compétitivité et l’adaptabilité dans un monde en évolution rapide.

Dans certains cas, la modification des politiques et des systèmes à l’échelle de l’entreprise pourrait entraîner des changements positifs. Dans d’autres, il faudra un changement de comportement de la part des dirigeants. Certes les cadres supérieurs peuvent articuler la vision et donner l’exemple, mais les cadres intermédiaires et ceux de première ligne sont des acteurs clés car ils donnent le ton aux équipes, ont une plus grande visibilité sur ce qui fonctionne et peuvent avoir la plus grande influence sur l’expérience des employés.

 

Toutes les entreprises ne chercheront pas à suivre le modèle « People and Performance winners ». Certaines sont singulièrement motivées par les résultats financiers.

Refaire la culture organisationnelle est un engagement difficile et continu qui nécessite de l’énergie, de l’autoréflexion et une volonté de changer les modèles familiers. Mais les entreprises qui adoptent une approche plus axée sur les personnes ainsi qu’une culture organisationnelle plus stimulante et responsabilisante ont beaucoup à gagner.

En plus d’augmenter les rendements financiers, ils peuvent améliorer leur cohérence, leur résilience, la rétention des talents, la fidélité des employés et leur réputation, et ce sont les caractéristiques des entreprises qui prospèrent à long terme.

 

(Source : https://www.mckinsey.com/mgi/our-research/performance-through-people-transforming-human-capital-into-competitive-advantage?stcr=6684B0CCFEED47309268B8BB1A7E6B51&cid=other-eml-alt-mip-mck&hlkid=f13c68efb4d74f788c7a4c41c147ddc1&hctky=12230133&hdpid=8603a4d4-8711-4356-9f8f-821cb1167f59)

 

Aucune reproduction ne peut être faite de cet article sans l’autorisation expresse de l’auteur.  A. Uzan. 5/03/2023.