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André Uzan

Ancien universitaire

Créateur d’entreprise

La numérisation de la levée de capitaux. La numérisation de la levée de capitaux.

La numérisation de la levée de capitaux opérée par des entreprises informatiques change la façon dont les capitaux sont, aujourd’hui, levés par les emprunteurs.

Le secteur des services financiers a longtemps été à la pointe de l’innovation technologique mais des entreprises technologiques (informatiques), qui n’ont jamais fait de finance auparavant, ont introduit des innovations qui changent la façon dont les capitaux sont transférés, levés et investis et, ainsi, ils ont pris de plus en plus de fonctions financières.

C’est vrai pour les banques en ligne et moyens de payement (PayTech) ; aussi pour le marché des prêts personnels et des levées de fonds de financement (CreditTech), ainsi que pour les placements (InvestTech).

Un premier article a été consacré à la numération du payement (PayTech).

Ce deuxième présente la numérisation de la levée de fonds (CreditTech).

Un article suivant présentera la numérisation des placements ((InvestTech).

 

  1. Le développement des plateformes numériques

Longtemps le service de prêt personnel et commercial et le service de collecte de fonds de financement ont été l’apanage de la banque pour qui la décision la plus difficile à prendre à toujours été d’évaluer la probabilité de défaut de l’emprunteur.

Longtemps la banque a dû chercher des clients, baser sa décision sur des critères qualitatifs relatifs à l’emprunteur (subjectivité de la décision) et, surtout, prendre le temps de décider.

Ce sont ces trois « faiblesses » de la banque (relations clients, décision subjective et temps de décision) que des entreprises informatiques ont exploitées en se situant d’abord à l’amont de l’activité bancaire puis à la place de la banque.

Aujourd’hui, la numérisation de la levée des capitaux est opérée;  des plateformes numériques facilite la relation directe entre emprunteur et préteur ; l’analyse des nombreuses données disponibles facilite et automatise l’évaluation des capacités d’emprunter ; et la décision de prêt tend à devenir instantanée.

Aux moyens traditionnels d’obtenir des capitaux (emprunt bancaire ou à des amis, recours au capital-investissement, émissions d’obligations ou d’action) s’ajoutent les trois types de plateformes suivantes  opérant la numération de la levée des capitaux  :

– la plateforme de prêts qui relient directement les prêteurs et les emprunteurs et qui permet aux particuliers et aux entreprises de contourner la banque et d’emprunter directement auprès des investisseurs ;

– la plateforme de crowdfunding, nouveau moyen de lever des fonds qui permet aux porteurs de projets de création d’accéder directement aux investisseurs individuels ;

– la plateforme crypto-basée d’offre publique de « jetons » (Initial Coin Offices ou ICO) qui utilise la souscription en crypto-monnaies.

 

  1. Le fonctionnement du prêt de plate-forme numérique.

Le prêt de plate-forme est une sorte de prêt « peer-to-peer » (P2P) où la banque peut intervenir comme intermédiaire ou comme accordeur de prêt.

Les forces des sociétés informatiques et de leurs plateformes sont l’interface utilisateur, l’analyse de données et la vitesse de décision ; ensuite elles utilisent les banques pour aider à la souscription et au service des prêts.

Le processus général de fonctionnement est le suivant :

-la demande de prêt se fait sur le site Web de la plateforme et conduit le demandeur à fournir les informations nécessaires à l’évaluation du risque et du taux d’intérêt (modèles de crédit de la plateforme).

-des groupes de demandeurs semblables sur le plan du risque sont définis et se voient attribuer le même taux d’intérêt ; ce que la plateforme peut réaliser en quelques secondes.

-si le taux est accepté, la demande sera publiée sur le site de la plateforme à destination des préteurs ; en fait la plate-forme ne propose pas l’intégralité du prêt à un seul investisseur ; elle divise le prêt en tranches. Le préteur peut ne souscrire qu’une tranche de ce prêt ce qui facilite la souscription des petits investisseurs et réduits les risques de défaut. Le prêteur peut aussi se constituer un portefeuille diversifié de tranches de prêts différents ;

-L’étape ultime du contrat et de la gestion de la souscription est, le plus souvent, assurée par une banque.

On notera que seul le prêteur assume les risques du prêt.

 

3. Les types des plateformes.et les risques encourus par les emprunteurs

3.1. Les types de plateformes

On peut les distinguer selon leur cible principale :

-la plateforme principalement destinée aux emprunteurs individuels qui ne pouvaient pas prétendre à un prêt bancaire ;

-la plateforme principalement destinées aux entreprises, en particulier aux PME, mais qui sont, en fait, utilisées aussi par de grands emprunteurs y compris les fonds spéculatifs et même les banques.

-la plateforme qui propose une levée de fonds en crypto-monnaie et vise à remplacer l’introduction en bourse.

Dans tous les cas il s’agit de faire se « rencontrer » directement acheteurs et vendeurs de crédit et à contourner les institutions financières traditionnelles ayant pignon sur rue.

3.2. Les risques

On a vu ci-dessus comment les plateformes réduisaient les risques de défaut encourus par les investisseurs.

Cependant ces derniers ne disparaissent pas.

On a observé, par exemple, qu’en période de récession les défaillances des emprunteurs sont nombreuses et, en même temps, les investisseurs deviennent très prudents, ce qui aggravent les risques pour tous.

On a aussi observé le développement de plateformes frauduleuses visant les entreprises.

 

  1. Les modèles d’affaire des plates-formes de financement participatif (crowdfunding)

On sait que ce type de financement concerne surtout les startup et PME, lesquelles sont souvent conduites à solliciter le financement des internautes (dons, prêts rémunérés, participations au capital.) comme alternative au capital-investissement.

On peut repérer trois types de modèle d’affaires :

– le modèle basé sur la récompense ;

– le modèle basé sur la prise contrôle ;

– le modèle basé sur la cryptographie.

4.1. Le modèle basé sur la récompense.

Ici, l’entrepreneur emprunteur promet au préteur de lui donner, ou de lui vendre à faible prix, le produit en cours de préparation.

L’entrepreneur peut ici être considéré comme un simple pré-vendeur et c’est l’utilité du produit qui attire les prêteurs. Mais c’est aussi, souvent, pour l’emprunteur un moyen d’évaluer l’intérêt que suscite l’idée du produit. En fait, de nombreux entrepreneurs utilisent cette méthode simplement comme une campagne de marketing espérant attirer l’attention des médias et des investisseurs privés de capital-risque.

L’entrepreneur fixe les objectifs et les limites du financement recherché et publie des mises à jour périodiques sur l’avancement du projet

Si l’objectif de financement minimum est atteint, l’entrepreneur est tenu de produire mais sans pouvoir garantir le résultat. S’il échoue, le capital versé est perdu et la seule sanction de l’emprunteur est une perte de réputation pour l’avenir.  S’il réussit, ses prêteurs sont satisfaits et sa réputation est accrue.

Le risque principal couru par les préteurs provient de l’asymétrie d’information entre les acteurs ; les entrepreneurs en savent plus sur leurs projets que les bailleurs de fonds et il n’y a pas d’intermédiaires qui recueillent des renseignements sur les projets ou qui forcent les emprunteurs à divulguer ces renseignements.

4.2. Le modèle fondé sur la prise de participation au capital (Pivate equity).

Il concerne l’investissement dans des sociétés non cotées en bourse (d’où son nom de « private equity » par opposition à public, c’est-à-dire introduction en bourse).

Ce sont des personnes mais plus souvent des sociétés de portefeuille ou des fonds d’investissement qui pratiquent ce modèle d’affaire, avec l’objectif de revente avec profit, à la demande de société ayant des besoins de croissance, de transmission ou de redressement.

La plateforme est mise en place et fonctionne comme la plateforme basée sur la récompense ;

Les deux types les plus couramment utilisés par les nouvelles plateformes en ligne sont les suivants :

– le crowdfunding autorisant des startups à lever un maximum d’un million de dollars par an auprès d’investisseurs individuels. Les startups n’ont qu’à divulguer quelques informations de base.

-Le financement participatif qui n’a pas de limite de financement mais réserve le financement aux investisseurs accrédités.

Les plateformes basées sur la prise de participation au capital facturent des frais d’intermédiation et prennent elles-mêmes des participations, ce qui peut induire des effets pervers.

4.3. Le modèle fondé sur la cryptographie.

Les avancées dans la technologie blockchain ont également été utilisées par des plateforme de crowdfunding.

Ce qui a permis à de nombreuses entreprises de lever un montant spectaculaire de capitaux, mais aussi, a généré un peu de controverse.

Le processus est le suivant : l’entrepreneur monte un projet et recoure à une blockchain publique programmable (par exemple : Ethereum ) pour solliciter des contributions à son capital, contributions payables en crypto monnaie.

On distingue parmi ces plateformes de crowdfunding basé sur le crypto monnaie selon ce que le souscripteur reçoit en échange :

-Le premier type (l’offre initiale de coins=jetons ou ICO) a, d’abord, permis aux souscripteurs d’obtenir les produits que l’entrepreneur vise à produire, puis a permis aux souscripteurs d’échanger leurs jetons.

Pour l’entrepreneur à la recherche de fonds, l’ICO est un processus de prévente de produits via une crypto monnaie.

Mais, les jetons crypto donnés aux souscripteurs peuvent être achetés et vendus librement sur des plateformes d’échanges crypto. Donc l’ICO a des fonctionnalités à la fois d’une campagne basée sur les récompenses et d’une introduction en bourse ; elle attire donc et les souscripteurs qui aiment le produit et les spéculateurs.

-Le deuxième type (l’offre de jeton de sécurité ou STO) est l’équivalent crypto du crowdfunding par actions mais n’est ouvert qu’à des organismes enregistrées.

 

  1. L’introduction en bourse (IPO : initial public offering 🙂 et l’offre initiale de jetons (ICO initial coin offering)

5.1. L’introduction en bourse (IPO)

Réaliser une introduction en bourse conduit à suivre le processus suivant :

– Engager un banquier d’investissement comme conseiller, évaluateur de l’entreprise et de la valeur de lancement de l’action et rédacteur du contrat liant emprunteur et souscripteur.

– Soumettre ce contrat à des organismes de réglementation pour approbation, condition de l’introduction ;

– Lancer la campagne de promotion du contrat pour inciter les investisseurs à acheter les actions au prix le plus élevé possible.

5.2. L’offre initiale de cryptomonnaie (ICO).  

Cette offre présente les caractéristiques suivantes :

-Il n’est pas besoin de conseiller financier.

-Le jeton n’accorde aucun droit de contrôle mais un accès au produit de la société emprunteuse.

-La promotion de l’opération reste nécessaire mais ne se fait pas auprès des investisseurs institutionnels mais auprès du public via les réseaux sociaux, en particulier.

-Le prix du jeton est librement décidé par l’emprunteur et modulé dans temps pour inciter à l’achat.

-Les souscripteurs et emprunteurs échangeront la crypto monnaie (Bitcoin ou Ether, par exemple) contre les jetons aux adresses blockchain respectives des échangeurs.

5.3. Les autres importantes différences.

-Les objectifs de financement.

Une campagne d’ICO a généralement un objectif minimum de collecte de fonds et un objectif maximum. Si le minimum n’est pas atteint l’opération s’arrête et les fonds collectés sont restitués aux investisseurs. Si le maximum est très élevé ou s’il est relevé, cela est considéré par les investisseurs comme un signal négatif.

-L’utilisation par l’emprunteur des fonds collectés

Dans un premier appel à l’épargne publique, l’utilisation des fonds est soumise à des règles et des auditeurs contrôlent la mise en œuvre.

Une campagne ICO ne fournit que de vagues information sur le projet et il n’y a quasiment aucun contrôle des investisseurs sur l’utilisation les fonds qu’ils prêtent.

-Le renouvellement de l’ICO.

Dans un premier appel à l’épargne publique, l’emprunteur s’engage généralement à ne pas faire de renouvellement de l’offre sans l’approbation des actionnaires existants, car tout renouvellement conduit à la dilution des actions en cours.

Cette restriction n’existe pas dans le cas d’une ICO, ce qui est un facteur de risque.

L’évolution de la valeur de la classe d’actifs ICO.

Les valeurs ICO sont plus volatiles que les autres crypto-monnaies et les performances sont très hétérogènes.

Le souscripteur a intérêt à observer les éléments suivants :

– la durée de la campagne ;

– les plafonds ;

– le moment du bonus (prix réduit). Au début le bonus peut réduire le prix de vente de 80% ce qui incite les souscripteurs à vendre leur avoir dès la vente au prix public ;

– la qualité du produit (récompense)

On sait que le marché de la cryptomonnaie est, dans une large mesure, déterminé par les sentiments des investisseurs. Cet aspect est encore plus important dans ICO parce que de nombreux projets tentent délibérément de créer un battage médiatique en utilisant tous les canaux de marketing à leur disposition.

Le souscripteur a intérêt à observer les indicateurs suivants pour évaluer le pourcentage probable d’investisseurs :

-le niveau de prix ; le prix bas n’est pas un indicateur suffisant ;

-le niveau de battage médiatique qui attirent les investisseurs irrationnels.

 

(Source : https://www.coursera.org/learn/credit-tech?specialization=financialtechnology

Pour consulter l’article précédent :

https://outilspourdiriger.fr/la-numerisation-du-paiement/

 

Aucune reproduction ne peut être faite de cet article sans l’autorisation expresse de l’auteur.  A. Uzan. 2/05 /2022.