(Source principale: Mooc de Coursera “Foundations of Everyday Leadership” G. Northcraft, University of Illinois.
https://www.coursera.org/learn/everyday-leadership-foundation )
On trouvera dans ce blog plusieurs articles portant sur la fonction de manager et sur le leadership :
-Compétences et performances du dirigeant : https://outilspourdiriger.fr/competences-et-performance-du-dirigeant/
-L’intelligence émotionnelle : condition du leadership. https://outilspourdiriger.fr/lintelligence-emotionnelle-condition-du-leadership-1/ https://outilspourdiriger.fr/lintelligence-emotionnelle-condition-du-leadership-2/
-Le leader = un profil d’activités : https://outilspourdiriger.fr/le-leader-un-profil-dactivites/
-La capacité de leadership : https://outilspourdiriger.fr/la-capacite-de-leadership/
-E. Manager ? https://outilspourdiriger.fr/e-manager-expression-pertinente/
Cet article présente les deux grands types de tâches qui constituent la fonction du manager-leader du quotidien et repère les conditions du succès de chaque tâche et de l’ensemble de la fonction.
On pourrait le résumer ainsi : le manager-leader du quotidien = deux tâches et deux leviers.
- Fonction et tâches du manager-leader du quotidien
Toute entreprise est un réseau de processus de transformation « d’entrées » en « sorties », un « réseau de postes de transformation », organisé, piloté et contrôlé par un réseau de managers.
Tout manager reçoit de sa direction ou négocie avec elle des objectifs et des moyens et doit faire en sorte que ces objectifs soient réalisés à la satisfaction de tous, direction, autres services et membres du service. Tout manager, directeur général ou manager de service, a donc un rôle de chef d’orchestre chargé de faire jouer ensemble et en harmonie tous ses « musiciens –collaborateurs » à la satisfaction de ses « clients » internes (direction, autres services) et externes (partenaires, clients finaux).
Les conditions d’exercice de cette fonction ont changé sous l’influence de la mondialisation de la concurrence, du développement de la technologie et de l’évolution des valeurs.
Le succès, voire la survie, exige désormais des managers des réactions plus rapides aux menaces et opportunités générées par l’environnement et des capacités plus grandes d’obtenir des coopérations et collaborations. Aussi, et sauf situation particulière, l’autorité statutaire suffit-elle de moins en moins.
Tout manager doit aussi être un leader capable de conduire ses collaborateurs et partenaires à vouloir réaliser les objectifs assignés par sa direction ou à suggérer à temps les ajustements nécessaires.
C’est donc désormais dans ces nouvelles conditions que tout manager exerce sa fonction quotidienne, sa fonction de leader du quotidien.
Si on ramène à l’essentiel cette fonction de manager leader du quotidien, on peut dire qu’elle comporte deux grands types de tâche : décider (ou proposer une décision) et mettre en œuvre ; pour le dire autrement, manager la décision et manager la motivation.
Repérer les conditions du succès de chacune de ces deux tâches impose de recourir aux deux leviers principaux complémentaires suivants : « l’inclusion » ou participation ou implication et la valorisation de la diversité.
- Le management de la décision
2.1. Les limites de la décision individuelle.
Prendre une décision conduit à parcourir les trois étapes suivantes : définition d’un problème, choix d’un objectif, sélection de la meilleure solution pour l’atteindre.
Un problème est un « écart entre le vécu et le souhaité » ; un objectif est le choix du souhaité à réaliser ; la solution est le moyen ou le chemin pour réaliser le souhaité choisi.
Chacun de nous a pu éprouver les difficultés de réaliser ce parcours dans sa plénitude et constater que, pour décider, il admettait de multiples approximations, raccourcis cognitifs, intuitions, etc. pour sentir finalement qu’il faisait un pari plus ou moins hasardeux.
Toute décision reste un pari, par définition, puisqu’elle concerne un résultat futur incertain, mais le rôle du manager est de réduire cette incertitude : en définissant exactement le problème (le vécu, le souhaité, l’écart, les causes principales de l’écart, la nécessité et l’urgence de le réduire etc.) ; en fondant clairement le choix du souhaité et la pertinence du moyen de le réaliser.
On sait qu’ici la subjectivité du décideur est inévitable et avec elle les biais heuristiques (méthodes de résolution de problème qui ne s’appuie pas sur une analyse détaillée ou exhaustive du problème) et les biais personnels: tendance à admettre des hypothèses non contrôlées et des similitudes approximatives, à éliminer d’emblée des facteurs explicatifs ou des options possibles, à être « victimes » de ses a-priori, d’influences, voire de pression, etc.
2.2. Les avantages de la décision en groupe. (Voir « Comprendre les comportements dans les groupes de travail ». https://outilspourdiriger.fr/les-comportements-dans-les-groupes-de-travail/)
C’est la réduction de ces effets indésirables qui impose de confier à un groupe la décision ou la vérification de la décision : en principe, la définition du problème sera d’autant plus complète qu’elle prendra en compte d’analyses des acteurs concernés ; le choix du souhaité sera d’autant mieux fondé qu’il prendra en compte de préoccupations et de contraintes ; le choix du moyen de réaliser sera d’autant plus pertinent qu’il prendra en compte de compétences et d’expériences diverses.
Par rapport à une personne, le groupe présente les avantages de fournir une palette plus large d’informations et d’analyses, de projets souhaités, de moyens expérimentés mais aussi et surtout la possibilité de confronter les analyses, opinions et choix, rendant la décision moins sujette à la subjectivité et aux biais divers et plus susceptible de la plus large adhésion.
Ces avantages ne sont pas, cependant, inhérents à tout groupe de décision mais sont d’autant plus susceptibles d’être générés que l’on maîtrise les 3 aspects suivants du fonctionnement du groupe : la composition, la participation, l’influence.
2.3. La fécondité du groupe de décision.
2.3.1. La composition
En tendance, nous sommes spontanément désireux de travailler avec les gens qui nous ressemblent et donc à composer des groupes de travail de personnes peu différentes. Or c’est la diversité, voire l’opposition, qui fait la fécondité du groupe malgré toutes les difficultés de fonctionnements ; et c’est la représentativité des acteurs concernés qui assure la collecte de l’information, la prise en compte des préoccupations et les chances de bonne mise en œuvre.
2.3.2. La participation
La principale difficulté à surmonter, ici, est l’équilibre entre non-participation et accaparement de l’attention collective. Tempérer ceux qui « savent tout ou qui s’opposent à tout », solliciter ceux qui n’osent pas s’exprimer ou craignent de le faire, telle est la tâche délicate mais indispensable du leader du groupe.
Les moyens de réduire la difficulté sont assez connus, en particulier celui de faire préparer la réunion par des sous-groupes.
2.3.3. L’influence
Deux types de d’influence peuvent réduire la fécondité d’un groupe.
L’incertitude peut conduire certains membres du groupe à s’en remettre à d’autres réputés plus compétents et à « censurer » leurs informations, avis, propositions, etc.
Sembler être seul de son avis ou en désaccord avec le groupe peut faire subir la «tyrannie du groupe », se sentir inquiet et incertain de son avis et sans doute renoncer à s’exprimer.
Les moyens de réduire ce type de difficulté sont divers :
-solliciter et collecter les analyses, avis, suggestions etc. de chacun avant la réunion collective.
-dans la réunion entre égaux, faire parler en premier les personnes les plus compétentes.
-dans la réunion regroupant plusieurs niveaux hiérarchique, faire d’abord parler les niveaux les plus bas.
–légitimer le désaccord et la dissidence en sollicitant que soit joué le rôle de « l’avocat du diable ».
La décision en groupe n’est pas seulement gage de meilleurs fondement et pertinence ; elle est aussi facteur de plus forte motivation pour la mise en œuvre.
- Le management de la motivation.
Il ne suffit pas de réussir à prendre la bonne décision, de bien définir le « quoi faire » ; il faut aussi savoir créer le « vouloir faire », l’envie, la motivation de mettre en œuvre.
La gestion de la motivation exige la compréhension et la maîtrise de ses déterminants ;
3.1. Les déterminants généraux de la motivation
Suivant ce que nous apprend V. Vroom, le choix de comportement fait par une personne dépend principalement de la « récompense » qu’elle attend de son comportement, de la désirabilité du résultat de son comportement et de ce qu’elle pense en obtenir (« gain » ou « perte »).
La notion de récompense utilisée ici recouvre toutes les formes possibles, allant de la prime financière à la satisfaction du pur besoin d’accomplissement.
Ainsi, la force de motivation de faire, du désir et de la volonté de faire, est le produit de 3 facteurs :
-la désirabilité du résultat et/ou de la récompense qui lui est liée (« valence »); ce qui dépend du système de valeurs de la personne ; on cherche à réaliser parce que c’est important « en soi » ou parce qu’il y a une récompense ; on rechigne ou refuse de réaliser pour les raisons inverses ;
-l’espérance d’obtention du résultat et/ou de la récompense qui lui est liée («expectancy ») ; ce qui dépend de l’évaluation de la capacité de réaliser le résultat ; un objectif hors d’atteinte est jugé décourageant, voire « malfaisant » et un objectif trop facile peu mobilisateur, voire « insultant » ;
-la confiance dans le lien entre résultat et récompense («instrumentality») ; ce qui dépend de la confiance accordée aux promesses de la direction.
3.2. Un déterminant spécifique aux organisations
Ce déterminant tient à l’interdépendance entre membres d’une même organisation, d’un même service, par exemple. La réalisation de l’objectif exige la mobilisation de tous et personne ne peut vraiment atteindre son objectif personnel sans l’effort des autres. Dès lors les autres deviennent une source d’incertitude quant à la motivation et à la récompense, que cette dernière soit individuelle ou collective.
Percevoir que des collègues s’investissent peu dans l’effort collectif, de façon délibérée ou de façon passive, peut conduire les autres membres à réduire leur motivation et leur effort.
3.3. Les objectifs du manager-leader.
On voit bien les lignes de l’idéal à atteindre en matière de gestion de la motivation :
-rendre la réalisation des objectifs hautement désirables pour tous et pas seulement via des récompenses financières ;
–ajuster aux capacités du moment de chaque collaborateur les objectifs qui lui sont assignés;
-créer les conditions de la confiance dans les promesses de la direction.
-être assuré que soient connus de tous les principes de comportement à respecter et « corrigés » les comportements non conformes à ces principes.
Cet idéal est, bien sûr, hors de portée en raison de la diversité des besoins et des valeurs des membres de toute entreprise et de l’imprévisible variabilité de l’activité mais il indique au leader la direction à prendre et les aspects à prendre en compte. (Voir l’article « La mobilisation des collaborateurs https://outilspourdiriger.fr/la-mobilisation-des-collaborateurs/)
Le repérage des conditions du succès de chacune des deux tâches du manager-leader indique clairement quels leviers principaux et complémentaires mobiliser : « l’inclusion » (« inclusiveness » ou participation ou implication) et la valorisation de la diversité.
- Inclusion et valorisation de la diversité (Voir « La mobilisation des collaborateurs » https://outilspourdiriger.fr/la-mobilisation-des-collaborateurs/)
4.1. Manager « l’inclusion »
On sait bien qu’il n’est de richesse que d’homme et que l’atout numéro un de toute entreprise est son personnel. On sait bien que, sauf rares exceptions, les membres de toute organisation veulent se sentir contribuer à la réussite collective et être fiers de cette contribution ; que pour cela, ils ont besoin de se sentir traités avec respect et confiance, informés, consultés, évalués, etc. ; et qu’ils ne tombent dans l’apathie, voire la colère et le blocage, que s’ils se sentent déconsidérés ou rejetés, etc.
C’est la façon dont ils sont traités qui détermine leur engagement, leur investissement dans le travail, leur fierté d’appartenir à l’entreprise, leur détermination à la défendre et la faire réussir.
Un tel engagement ne se décrète pas, ne s’obtient pas par acte d’autorité, ni ne s’achète par des récompenses financières. Chaque manager doit le construire, patiemment et humblement, par son leadership de tous les jours dans ses deux fonctions principales :
-faire que chaque décision soit prise aussi collectivement que possible (Management de la décision) ;
-faire que chaque acteur de la mise en œuvre ait une claire vision et une bonne adhésion au but de la mise en œuvre, au rôle et aux échéances à tenir (Management de la motivation).
4.2. Manager la diversité.
Créer les conditions de l’engagement collectif ne veut pas dire réduire, voire éliminer, la diversité.
En fait, on devrait plutôt dire, aujourd’hui, que l’atout numéro un de toute entreprise est la diversité de son personnel.
Une diversité minimale est nécessitée par la diversité des tâches à accomplir ou entraînée par le recrutement de jeunes collaborateurs mais doit être combattue la tendance à toujours recourir aux mêmes types ou sources de formations pour chaque fonction.
La diversité des expertises, des expériences mais aussi des cultures est de plus en plus nécessaire pour faire face à la complexité et à fréquence des problèmes qui surgissent ; mais cette diversité ne peut être transformée en créativité que par un manager-leader capable de construire patiemment et humblement le climat permettant de :
– valoriser les différences d’analyse du passé et de vision du futur ; en les sollicitant, les respectant, et les discutant collectivement ;
-réduire nettement la pression à la conformité imposée par le groupe ou l’autorité et, donc, le sentiment de risque qu’éprouve tout « marginal » ou « avocat du diable ».
Aucune reproduction, ne peut être faite de cet article sans l’autorisation expresse de l’auteur ». A. Uzan. 20/09/2016