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André Uzan

Ancien universitaire

Créateur d’entreprise

L’intelligence émotionnelle : condition du leadership. 2. L’intelligence émotionnelle : condition du leadership. 2.

 

(Source: Harvard B.R. Dec.2001  http://hbr.org/2001/12/primal-leadership-the-hidden-driver-of-great-performance/ar/7

by D.Goleman, Rutgers University  – R.Boyatzis, Case Western Reserve University –A.McKee, University of Pennsylvania)

D. Goleman a été le premier à définir le concept « d’intelligence émotionnelle» et à le présenter comme condition essentielle du leadership. Ses recherches démontrent que tout dirigeant doit avoir des compétences techniques, cognitives et relationnelles mais que ce sont ces dernières qui expliquent le mieux les résultats de management. D. Goleman a dénommé ces compétences « Intelligence émotionnelle » et définit ainsi les composantes de cette intelligence: la conscience de soi (Self-Awareness); la maîtrise de soi (Self-Regulation); la motivation d’accomplissement (Motivation) ; l’empathie (Empathy) ; le savoir-être avec les autres  (Social Skill). (Voir l’article « L’intelligence émotionnelle : condition du leadership.1.»)

Dans le présent article, les auteurs répondent aux 2 questions suivantes :

-comment se fait le lien entre l’état d’esprit du dirigeant et ceux de ses collaborateurs ?

-comment un dirigeant peut renforcer son intelligence émotionnelle ?

 

  1. Le lien entre états d’esprit.

Chacun a pu éprouver le plaisir, voire le bonheur, de travailler avec telle personne (professeur, dirigeant, etc.) et l’angoisse, voire le malheur, de travailler avec tel autre ; dans un cas, le climat de travail est permissif, stimulant, renforçant le désir de partager l’information, de créer, de faire, d’apprendre, etc. ; et dans l’autre cas, le climat incite à considérer les autres comme des ennemis, à se replier sur soi, à ne prendre aucune initiative, etc.

Les états d’esprits sont contagieux et c’est ce que confirment des expériences de la vie courante et des expériences en milieu médical.

On peut ainsi expliquer pourquoi une mère peut calmer ou faire redoubler les pleurs de son enfant ;  ou pourquoi la présence réconfortante d’une personne peut réduire la pression artérielle d’un malade et ralentir sa sécrétion d’acides gras dangereuse pour les artères ; ou pourquoi une personne peut provoquer chez une autre une modification de sa pulsion cardiaque, de ses hormones, de son rythme du sommeil, etc.

Des expériences médicales montrent que des personnes ayant une conversation sympathique finissent par avoir une rythme cardiaque semblable ; que les émotions sont contagieuses même à distance et même s’il n’y a aucun échange verbal, comme chacun a pu le constater dans un ascenseur, en présence d’un inconnu.

L’explication tient à notre système limbique, notre centre émotionnel, qui est sensible aux influences extérieures. En fait, notre état d’esprit est déterminé par notre relation avec les autres ; notre système limbique laisse les autres changer notre état d’esprit, nos émotions.

C’est ainsi que l’état d’esprit du dirigeant est contagieux et se diffuse dans l’organisation comme l’électricité dans le câblage.

Et c’est ainsi que se comprend le lien entre le degré d’intelligence émotionnelle d’un dirigeant et le niveau de sa performance professionnelle par l’intermédiaire de celle de ses collaborateurs.

Un leader doit être en résonance dynamique avec ce qui l’entoure.

 

  1. Renforcer son intelligence émotionnelle.

Pour un dirigeant, connaitre son niveau d’intelligence émotionnelle et l’impact de ses émotions sur les autres, connaitre son « style émotionnel », savoir s’il est en résonance avec son organisation, est très difficile. Les erreurs habituelles faites ici consistent à penser qu’on peut s’analyser tout seul et que, si l’impact est mauvais, les collaborateurs vont spontanément le dire. En fait, la perception des autres est indispensable pour se connaître mais les autres peuvent avoir peur de donner à leur supérieur ce qui peut être considéré comme une « mauvaise nouvelle », une évaluation qui n’est pas de leur ressort, une invasion de la sphère privé d’autrui, une impression floue, etc.

Les habiletés émotionnelles d’une personne ne sont pas innées mais sont, par contre, solidement imprimées dans sa neurologie. Certains aspects sont génétiques, par exemple l’émotivité ou la timidité, mais l’acquit joue un rôle majeur dans la manière dont l’inné se manifeste.

Un enfant joyeux mais maltraité peut devenir un adulte malheureux mais il peut aussi redevenir épanoui si son environnement s’y prête. De la même manière, les capacités émotionnelles construites s’ancrent d’autant plus dans le «circuit neuronal» qu’elles sont pratiquées, mais elles peuvent aussi évoluer et le «circuit neuronal» être « recâbler».

Les étapes de cette « reformation » sont classiques = imaginer un objectif à atteindre ; évaluer ses faiblesses et ses forces initiales; repérer le chemin à parcourir ;  consolider les progrès.

 

2.1. Quel leader veux-je devenir ?

Au demandeur de formation, il est demandé de s’imaginer être dans 5 ans un bon leader et d’écrire ce qui se passe un jour typique d’alors : ce qu’il fait, ce qu’il vit, ceux qui sont là, ce qu’il ressent ; ce que sont ses valeurs, ses rêves, etc.

Cet exercice vise à faire apparaître le problème,  l’écart qui sépare l’idéal de ce qui est vécu. Dans le cas présenté par les auteurs, Sofia qui a du mal à percevoir pourquoi « Rien ne va ! » et pourquoi elle se bat tous les jours au travail comme à la maison a commencé à y voir plus clair lorsqu’elle a  imaginé la situation professionnelle de ses rêves  et qu’elle s’est vue devenir un leader heureux et détendu.

 

2.2. Quel leader suis-je aujourd’hui ?

Une certaine ignorance de son style de leadership peut avoir l’avantage de se protéger de l’anxiété mais l’aveuglement est dangereux. Connaître ses faiblesses de leadership exige de déclarer être ouvert aux critiques ou, mieux, de les solliciter, de la part de ses subordonnés et de ses pairs en particulier ; pour savoir, par exemple, comment ils se sentent écoutés, compris et considérés ; s’ils trouvent leur dirigeant ouvert aux idées nouvelles, accessible, stimulant, prêt à aider, etc.

Ce repérage des faiblesses et des forces est décisif pour définir les progrès à faire.

 

2.3. Comment aller vers l’objectif ?

Après avoir réalisé le repérage ci-dessus, Sofia monta le plan suivant :

– soumettre à ses collaborateurs un questionnaire anonyme portant sur son style de leadership;

– tenir un journal consignant son comportement et ses réflexions de la journée ;

– suivre une formation dans l’université voisine;

– choisir un collègue de confiance pour lui servir de coach informel.

Un directeur commercial constatant qu’il était perçu comme intimidant, râleur et egocentrique  monta, lui le plan suivant pour améliorer sa capacité d’empathie :

-faire connaissance personnelle de chacun de ses collaborateurs hors du lieu de travail ;

-faire du bénévolat dans les associations locales pour expérimenter d’autres comportements.

Le changement de comportement n’est jamais immédiat mais la conscience de l’effort à faire a été le début de l’abandon du comportement ancien et de l’adoption du nouveau.

 

2.4. Comment consolider les progrès ?

Briser l’ancienne habitude de comportement exige la pratique répétée du nouveau jusqu’à ce qu’il devienne automatique ; mais envisager, visualiser la nouvelle pratique est le début du succès.

Ainsi, un manager perçu comme froid et dur par ses collaborateurs mais désireux de progresser s’est donné pour objectif de retenir son impatience habituelle et d’écouter avant de prendre une initiative.

Les études portant sur le cerveau affirment que visualiser de façon répétée un scénario détaillé de comportement produit les mêmes effets neuronaux que le comportement lui-même. C’est la fonction classique de la préparation : commencer et rendre plus facile la réalisation.

Ainsi, pratiquer le nouveau comportement, par la pensée ou dans la réalité, est la première des conditions d’acquisition de cette nouvelle capacité. La seconde est de trouver l’aide des autres et en particulier de personnes de confiance pouvant servir de « miroir » aux essais de nouveaux comportements et aux progrès réalisés. En fait, seul un tel environnement peut nous faire comprendre l’utilité de ce nous apprenons et des progrès que nous faisons

 

La conclusion des auteurs est la suivante : « On sait que d’autres compétences sont nécessaires à tout dirigeant, mais l’intelligence émotionnelle est l’étincelle qui produit le feu de joie ou le champ de ruines dans les entreprises ». Excessif mais pas inexact !

 

Aucune reproduction, ne peut être faite de cet article sans l’autorisation expresse de l’auteur.  A.Uzan. 6/05/2013