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Les stratégies de croissance principales peuvent se ramener à quatre :

– croissance interne ou organique.

– croissance par entrée dans un marché nouveau.

– croissance par acquisition.

– croissance par innovation

Pour une entreprise, croître, se développer, ce n’est pas seulement accroître son activité à court terme, c’est remplir sa mission dans la durée, au bénéfice de plus de parties prenantes, en développant ou renouvelant ses spécificités (valeurs, objectifs, capacités, avantage concurrentiel).

Les stratégies de croissance sont donc les saisie et les exploitation des opportunités de croissance, des opportunités qui permettent de croître dans la durée, en développant son avantage concurrentiel et en respectant ses valeurs.

Les stratégies de croissance ne doivent pas être choisies pour des raisons aléatoires (pression des marchés, espoirs de rentabilité meilleure ou de part de maché plus grande, fierté de devenir plus grand, etc.) mais pour développer sa mission.

Une croissance rapide n’est pas obligatoire, ni facteur nécessaire de succès mais peut être facteur important de risques (surcapacité de production, insuffisances de ressources, priorité au revenu sur la rentabilité, choix inconscient de la fausse direction, etc.)

Dès lors, il faut savoir pourquoi croître, si on est prêt à croître et quelles sont les meilleures façons de croître.

Les deux premières questions étant propres à chaque entreprise, cet article ne traite que de la troisième (les meilleures façons de croître)

 

Dans cet article ci on présentera deux des quatre stratégies, la croissance organique et la croissance par entrée dans un marché nouveau ; et un prochain article présentera les deux autres.

 

  1. La croissance organique (« Growth through Scaling » ou croissance par changement d’échelle).

1.1. Les analyses préparatoires

C’est la stratégie de croissance la plus courante mais pas nécessairement la moins exigeante en analyse préparatoire.

Elle consiste essentiellement à développer l’activité en cours ; à développer la clientèle (segment de client nouveau) ou l’implantation géographique.

Evaluer une opportunité de croissance organique conduit à opérer de multiples analyses préparatoires :

-identifier un segment de marché à fort potentiel de croissance (clientèle ou localisation) ;

-analyser la concurrence et, plus généralement, analyser les cinq forces (P. Druker) qui agissent dans le marché ;

-analyser l’environnement ; pour repérer les tendances socio-économiques en cours ;

-analyser le cycle de vie concurrentiel l’étape du cycle de vie de ce segment de marché particulier ;

-évaluer les capacités nécessaires à la croissance visée et préparer leur adaptation ;

-analyser les changements susceptibles de se produire chez les parties prenantes (salariés, fournisseurs, financeurs, partenaires en tout genre) ;

– tester la robustesse de la stratégie interne retenue par l’utilisation de la méthode des scénarios.

1.2. La construction de scénarios

Tout projet de croissance est un pari sur l’avenir, pari risqué, pari que l’on peut gagner ou perdre.

Plutôt que de se contenter de juxtaposer des prévisions partielles, il vaut mieux repérer et comparer des scénarios de croissance pour réduire les incertitudes et donner de la robustesse à la prévision.

Pour prévoir, on peut prendre appui sur les tendances observables en estimant la probabilité et le délai de leurs réalisations. Mais il y a des inconnues nettement plus incertaines et qui pourraient avoir un impact décisif sur le projet de croissance, voire sur l’entreprise.

La méthode des scénarios vise à réduire ces incertitudes :

-La première étape de la méthode des scénarios consiste à définir la ou les incertitudes majeures qui conditionnent le succès du projet. Ici, on peut retenir comme incertitude majeure, par exemple, comment vont évoluer les comportements des prospects et clients ou la technologie de production ou l’environnement concurrentiel dans les années qui viennent (horizon temporel approprié).

Cette recherche des incertitudes majeures sera d’autant plus productive qu’elle associera des experts intérieurs et extérieurs à l’entreprise

-La deuxième étape consiste à hiérarchiser les incertitudes selon l’importance de l’enjeu et le degré d’incertitude.

-La troisième étape vise à construire des scénarios concernant les deux incertitudes majeures, en les croisant selon la matrice ci-dessous portant sur les consoles de jeux vidéo :

Méthode des scénarios

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les Incertitudes principales retenues sont les suivantes :

-quel modèle de ventes des jeux (en abscisse) ? Les clients préféreront-il la licence/streaming ou l’achat ?

-quel type d’appareil sera utilisé ? Un appareil à usage spécifique ou un appareil domestique à usages multiples.

On peut ainsi définir quatre scénarios différents, quatre futurs possibles pour l’entreprise et qui s’excluent mutuellement.

-La quatrième étape consiste à écrire ces scénarios ; essayer, pour chaque scénario, de décrire la situation ou les défis à surmonter ; essayer de définir les étapes et la période de réalisation du scénario ; essayer de percevoir les impacts sur l’entreprise, etc.

-La dernière étape est celle des décisions stratégiques à prendre et du test de chaque décision sur les types de scénarios. La stratégie à retenir ne peut convenir pour tous les scénarios mais peut être considérée comme pertinente pour l’un d’eux. On doit alors, sur cette base, commencer à se poser la question du comment faire pour y parvenir.

On peut aussi tester quelques jeux d’incertitudes différentes et, peut-être, même des combinaisons d’incertitudes.

 

  1. La croissance par entrée dans un marché nouveau.

Ce type de croissance vise à offrir de nouveaux produits au marché en cours ou des produits en cours sur des marchés nouveaux (Nouveaux segments de clientèle, nouveaux marchés géographiques).

En général cela veut dire entrer en concurrence avec des rivaux ; par les prix ou par la différenciation des produits ou de l’offre.

L’entreprise qui vise la croissance par l’entrée dans un milieu nouveau doit connaitre ce milieu.

Les outils de cette connaissance sont bien connus :

-l’analyse des cinq forces de M. Porter ;

-l’analyse de la concurrence pour repérer qui sont ou peuvent être les concurrents et commencer à comprendre leurs modes d’action et leurs modes de réaction à l’action des autres entreprises,

-La théorie des jeux qui permet de décider en meilleure connaissance de cause ; en repérer les réactions probables des concurrents en fonction des options dont ils disposent et des gains futurs associés (voir ci-dessous).

Les concurrents potentiels peuvent être de deux types :

-les autres « nouveaux entrants » potentiels ayant les capacités pertinentes, situés dans un secteur en déclin ou ayant une ambition de croissance par l’entrée ;

-les entreprises fournisseurs ou partenaires visant l’intégration verticale.

La difficulté ici est de se mettre à l’affut des signes avant-coureurs en pratiquant une veille pertinente et en prenant des participations minoritaires bien choisies.

 

Cette stratégie de croissance par entrée dans un nouveau marché doit être décomposée en stratégie de préparation de l’entrée et stratégie pst-entrée. 

2.1 Les stratégies de pré-rentrée.

L’entreprise visant l’entrée doit savoir qu’elle peut rencontrer des stratégies de dissuasion ou des stratégies d’accommodement ou les pratiquer elle-même.

2.1.1. Les stratégies de dissuasion.

Elles visent à augmenter les risques d’entrée des concurrents par l’un ou plusieurs des moyens suivants :

-ériger des barrières structurelles (licences, par exemple) ;

-réduire l’incitation à entrer en augmentant les coûts d’entrée (publicité, augmentation des salaires, etc.) :

-réduire l’information sur les coûts et la demande que peut recueillir le concurrent ;

-afficher ses capacités si elles sont fortes ;

-faire état de sa capacité d’actions agressives et de représailles (en citant des expériences vécues).

Dans ce cas, l’entreprise visant l’entrée doit pratiquer les politiques suivantes :

-affirmer fortement son intention de se battre si nécessaire ;

-faire connaitre les moyens dont elle dispose pour faire face à la concurrence ;

-pratiquer des prix bas si elle possède un avantage de coût.

2.1.2. Les stratégies d’accommodement

Elles sont nécessaires si la dissuasion est trop coûteuse pour tous :

Elle conduit à préparer et faire connaitre les actions suivantes :

– Faire connaître sa différenciation et le choix du segment à servir pour marquer la complémentarité de son offre à celles des concurrents en place ;

– Faire connaître nettement son intention de ne pas rivaliser de manière agressive ;

– faciliter la collaboration, par exemple en participant à l’association professionnelle ou d’autres activités locales.

 

2.2. Les stratégies post-entrée

Ici le choix est entre le combat et la coopération 

2.2.1. Les stratégies de combat

On sait que la stratégie du combat par les prix peut être contre-productive pour tous.

Mais elle peut aussi être productive dans les cas suivants ;

-si la demande est élastique au prix (augmentation des ventes par baisse des prix) ;

-si on peut bénéficier d’un effet de réseau (la valeur d’un bien augmente à mesure que d’autres l’adoptent) ; la baisse des prix voire la gratuité, permettent, alors, de prendre rapidement et de conserver des parts du marché ;

-Si on bénéficie d’un avantage de coût (effets d’économie d’échelle, par exemple) ;

-si on s’implante dans un marché de niche, relativement « insensible » aux baisses de prix.

Le combat peut aussi être lancé sur le terrain des coûts en prenant des initiatives en matière de rémunération ou de publicité.

2.2.2. Les stratégies de coopération.

Elles visent à réduire la concurrence en augmentant les incitations à coopérer par les moyens suivants :

engagement de ne pas pratiquer une concurrence agressive tant que les autres en font autant ;

-incitations à réagir collectivement contre un concurrent très agressif ;

-changement partiel de la concurrence par une acquisition ou un partenariat ;

-action auprès des pouvoirs publics pour obtenir une nouvelle réglementation.

 

  1. Introduction à la théorie des jeux.

La théorie des jeux est un domaine des mathématiques qui s’intéresse aux interactions stratégiques d’acteurs (appelés « joueurs »)

Comment le montre les matrices ci-dessous c’est la simulation des effets de la concurrence.

A titre d’exemple, on a retenu ici deux entreprises en concurrence (Firm 1 et Firm 2) et examiné les effets de deux décisions : entrée ou pas sur le marché (Entry) réduction des prix ou pas (Cut).

L’évaluation des bénéfices et des pertes sont ici imaginaires mais, dans la réalité, ils devraient être évalués le mieux possible.

Théorie des jeux

 

 

 

 

 

 

 

 

 

3.1. Deux entreprises se demandent quels seraient leurs résultats s’ils entrent dans un marché M. (schéma de gauche)

Chaque cadrant comporte les résultats estimés ; celui de l’entreprise 1 en bas, et celui de l’entreprise 2 en haut.

Si l’entreprise 1 n’entre pas sur le marché, elle perdra 30 $, correspondant aux coûts perdus de la préparation.

Et c’est pareil pour l’entreprise 2 qui perd 30 $ si elle n’entre pas non plus.

S’ils entrent tous les deux sur le marché, ils vont perdre chacun 50 $ parce que le marché ne peut tout simplement pas soutenir deux entrants sans faire baisser les prix et réduire les marges.

Si seul l’un des deux entre, il gagne 200 $.

Dans un jeu symétrique, les gains d’une entreprise sont les pertes de l’autre entreprise.

3.2. Jeu de baisse des prix .

Théorie des jeux .2

 

 

 

 

 

 

 

Deux entreprises se demandent quels seraient les résultats d’une baisse des prix.

Si seule l’une des entreprises baisse ses prix, elle gagne 200 $.

Si les deux entreprises baisent leur prix le résultat est nul pour chacune.

3.3. Jeu d’implantation d’une usine.

Théorie des jeux.3

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

C’est un jeu asymétrique.

Chacune de deux entreprises se demande s’il serait rentable pour elle de construire une nouvelle usine dans les endroits A ou B.

Si les deux entreprises choisissent d’investir en A, l’entreprise 1 ferait mieux que l’entreprise 2 = 150 $ contre 50 $.

Si les deux entreprises choisissent d’investir en B, l’entreprise 1 ferait mieux que l’entreprise 2 = 125$ contre 100 $

L’entreprise 1 peut donc investir dans les deux lieux mais sa préférence ira vers A (rentabilité = 150).

L’entreprise 2 doit donc investir dans B si l’entreprise 1 investit dans A.

 

Source principale : Stratégie de croissance des entreprises. Université de Virginie

https://www.coursera.org/learn/uva-darden-business-growth-strategy/

 

Pour plus de développements, voir les articles de la rubrique « Stratégie » et en particulier les suivants :

https://outilspourdiriger.fr/les-outils-de-lanalyse-strategique-1/ 2 et 3.

https://outilspourdiriger.fr/les-strategies-globales-denreprise/

https://outilspourdiriger.fr/la-strategie-de-diversification/

https://outilspourdiriger.fr/la-strategie-dinternationalisation/

 

Aucune reproduction ne peut être faite de cet article sans l’autorisation expresse de l’auteur.  A. Uzan. 20/03/2022