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André Uzan

Ancien universitaire

Créateur d’entreprise

Outils pour entrepreneurs de startup. 2. Outils pour entrepreneurs de startup. 2.

 

Source = Mooc “Technology Entrepreneurship”. C. Eesley, Stanford University

 

Voici le deuxième article présentant l’essentiel de ce Mooc (cours en ligne ouvert à tous) donné par Stanford University à destination de ceux qui veulent comprendre ou pratiquer l’entrepreneuriat technologique.

Il traite de l’idée source de la startup, de la construction du modèle d’entreprise (Business model ou BM) et du lean startup.

 

  1. Les sources et affinements de l’idée.

1.1. La source de l’idée.

On sait que pour chaque porteur de projet,  l’idée de l’opportunité de créer résulte de l’interaction entre ses goûts, ses capacités et les manques qu’il perçoit dans l’environnement, chez le consommateur final ou dans les moyens et méthodes de production.

Les manques observés sont révélés par l’observation, l’expérience ou la recherche systématique de l’amélioration à trouver. Les goûts ont déterminé les formations acquises, les activités pratiqués ou observées et surtout l’envie, voire l’intention, de créer une entreprise. Les capacités résultent des formations et des expériences.

Condition supplémentaire importante, l’idée de créer ne doit pas apparaitre d’emblée hors de portée, pour raisons de compétences, finances ou autres.

En général l’idée précède l’envie de créer ; dans le cas contraire, il est conseillé de consulter l’APCE (http://www.apce.com/pid912/nouvelles-idees-et tendances.html?espace=1&tp=1), les sites internet innombrables ainsi que les manifestations diverses concernant les startups.

Concernant la source de l’idée de startup, le tableau ci-dessous souligne la particularité des entrepreneurs de startup américains anciens diplômés du MIT par rapport à leurs homologues chinois et français :

Outils.startup.2.1

75% des anciens du MIT puisent leur idée de startup dans le milieu industriel et 15% dans le milieu de l’enseignement ou de la recherche, les proportions étant quasi inversées chez les entrepreneurs chinois et sans doute aussi pour les français.

En France les tendances à former des créateurs de startups et à créer des startups sont nettement croissantes mais les informations disponibles tendent à indiquer que la recherche publique est la source dominante des idées malgré les efforts faits pour renforcer le « pont » entre secteur public et l’entreprise.

 

1.2. Le nécessaire recours aux « leads users »

(http://www.escp-eap.net/conferences/marketing/pdf/gollety.pdf)

Dans les domaines techniques ou celui de la consommation, il y a toujours des personnes ou des groupes qui ressentent les besoins nouveaux avant tout le monde, anticipent leur généralisation et cherchent ou expérimentent des solutions.

Ce peut être un expert (ou une équipe), spécialiste d’un domaine et ayant intérêt à y développer des idées nouvelles ; ce peut aussi être un simple utilisateur (ou un groupe), ayant une expertise d’usager et les mêmes autres qualités et motivations. Dans l’un comme l’autre cas , c’est l’insatisfaction,  le goût de créer et le besoin de reconnaissance sociale qui motivent ces précurseurs et leur donne un rôle de leader d’opinion.C’est que les américains appellent des « lead users » et que nous appellerons « experts ou utilisateurs innovateurs ».

Tout porteur d’idée de startup devrait repérer et rechercher la collaboration des « lead users » les plus proches de son idée, comme le montre les résultats ci-dessous de l’étude conduite par l’initiateur du concept, E.V. Hippel,  avec la société 3M.

Outils.startup.2.2

 

Le tableau compare les résultats obtenus par des équipes de développement de 3M selon qu’ils ont ou pas bénéficié de l’aide de « lead users » (LU Ideas – Non LU ideas).  La différence de résultats est nette et sur quasi tous les indicateurs retenus.

 

  1. La constuction du modèle d’entreprise (Business model ou BM).

Le candidat à la création a construit son idée de l’opportunité à saisir et sa vision du modèle d’entreprise (BM) à créer mais cette idée et cette vision ne sont qu’un faisceau d’hypothèses et d’espoirs. Il lui faut tester ces hypothèses, les modifier éventuellement, et, en tous cas, trouver et valider un modèle d’entreprise ayant de bonnes chances de viabilité et de croissance.

Le BM, « modèle de simulation » indique clairement les étapes à suivre et les itérations éventuelles à faire. On indiquera les principales difficultés à surmonter.

Modèle.Entrep

2.1.Les étapes de la construction

2.1.1. Choisir et valider les pièces de l’ensemble « commercialisation-offre » en répondant aux questions suivantes :

-Quelle offre proposer à quel segment de marché et quels besoins satisfaire mieux que la concurrence ?

-Quels canaux de distribution retenir et quelles relations établir avec les clients et prospects ?

-Quels flux de revenus espérer comme conséquence des choix précédents ?

-Quelles modifications des choix précédents faire éventuellement (itérations) pour améliorer le flux de revenus ou surmonter un obstacles important ?

2.1.2. Explorer les effets des choix précédents sur l’ensemble «fournisseurs-production-offre» en répondant aux questions suivantes :

-Quelles doivent être les attributs du produits pour correspondre aux attentes des clients et quelles modifications faire à l’idée initiale du produit ?

-Quelles sont les ressources clés requises pour réaliser la production, la distribution, la relation avec le client et la génération des flux de revenus ?

-Quelles sont les activités clés exigées pour réaliser les opérations précédentes ?

-Quels sont les partenaires clés avec qui traiter et établir des partenariats ?

-Quels sont les coûts résultant de ce dernier ensemble de choix ?

-Quels sont les financements nécessaires et à quels termes ?

-Quelles modifications des choix précédents faire éventuellement (itérations) pour réduire les coûts et les besoins de financement ?

2.1.3. Vérifier et faire vérifier la cohérence et le réalisme du BM construit.

2.1.4. Rédiger le Plan d’affaire (Business plan) et partir à la conquête des financiers .

 

2.2. Les difficultés à surmonter.

2.2.1. Réduire l’incertitude

Créer une startup, c’est engager un projet risqué, un  pari, dans des conditions de grande incertitude. La certitude est hors de portée mais l’incertitude doit être réduite par la vérification des hypothèses admises, jusqu’à obtenir les ordres de grandeurs à partir desquelles on puisse dire : « c’est impossible ! », « c’est jouable ! »,  » ce n’est possible que si telles conditions sont réunies..! « .

Inutile de préciser que cette vérification exige de « sortir de son bureau » et de dialoguer, sinon co-concevoir, avec les prospects et partenaires potentiels pour comprendre vraiment les termes de leurs problèmes et les conditions à réunir pour obtenir leurs coopération ;  elle exige également que les choix soient réajustés selon les résultats de la vérification.

2.2.2. Gérer l’interdépendance.

La difficulté principale dans cette vérification tient à l’interdépendance entre les points principaux du BM en particulier entre les aspecst techniques (conception du produit) , commerciaux (utilité/prix pour le client) et financiers (financement et capacité de remboursement par la rentabilité) ; difficulté qu’on ne peut résoudre que par l’itération et la récherche d’un optimisation acceptable pour débuter.

2.2.3. Tempérer l’optimisme et la détermination .

Une autre importante difficulté tient au fait que tout porteur de projet de startup voit son projet « comme une mère son bébé » , avec la certitude qu’il est ardemment attendu par tous et la détermination de le conduire au succès . L’optimisme et la détermination sont indispensables mais aussi, malheuseument, dangeureux ; trop d’optimisme conduit au « biais de confirmation » (tendance naturelle à privilégier les informations qui confirment l’hypothèse sans considération pour la véracité de ces informations) et éloigne du réalisme ; et trop de détermination réduit la capacité de s’adapter aux indications de l’environnement. Cette difficulté souligne la nécessité d’obtenir des avis et collaborations d’experts extérieurs.

2.2.4. Avoir tout prévu avant la recherche du financement et la conquête des clients.

Il est possible de parcourir et d’autofinancer toutes ces étapes dans le cas d’un projet simple dont la préparation ne dure que quelques mois. Par contre, cela serait infiniment plus difficile pour des projets plus complexes exigeant la fabrication de prototypes, des mises au point techniques et commerciales nombreuses et donc un temps se comptant en années.

 

  1. Lean startup et effectuation

Les difficultés de la construction des BM et BP complets, la lourdeur et le coût de la cette construction, la vanité de la prétention de prévoir tous les détails et…les fréquents irréalismes de ces plans ont conduit à proposer d’autres méthodes pour entrepreneurs de startups : le « lean startup » et « l’effectuation ».

3.1. Le « lean startup ».

Le terme « lean » (opposé à « fat= gras ») désigne la recherche d’action « dégraissée » de l’inutile, de ce qui n’est pas l’essentiel.

C’est ainsi que cette approche réfute la nécessité de suivre toutes les étapes de la construction des BM et BP et donne la priorité à l’expérimentation, à l’avis du prospect, à l’élaboration progressive et itérative du produit et la préférence à l’échec précoce mais réparable plutôt qu’à l’échec terminal quasi-irréparable.

Ce sont les hypothèses et espoirs concernant le produit et la clientèle qui sont essentiels, qu’on ne peut faire qu’en collaborant avec des prospects et partenaires choisis, qu’on doit faire le plus rapidement possible et en pratiquant le plus « agilement » possible l’itération entre demandes des clients en matière de qualité et de prix et exigences techniques et économiques de l’offre,  jusqu’à trouver l’offre adaptée.

Une fois cet ajustement obtenu, c’est un BM et un BP plutôt « qualitatif » qu’il faut rédiger et utiliser pour obtenir le financement nécessaire à la réalisation de l’étape ultérieure : mises au point techniques, tests commerciaux, industrialisation, commercialisation.

On notera, ici, que les capitaux-risqueurs ont déjà pris en compte ces pratiques puisqu’ils se sont spécialisés selon l’étape de développement de la startup.

 

3.2. « L’effectuation » (http://www.effectuation.org/sites/default/files/documents/effectuation-3-pager.pdf).

Cette approche préconisée par S. Sarasvathy (Université de Virginie) va encore plus loin dans le changement d’attitude à l’égard de l’incertitude ; au lieu de chercher à la réduire par la prévision et la vérification des hypothèses, elle préconise de suivre son désir et de se lancer, en comptant sur son énergie et ses capacités pour adapter la situation à son désir et sur sa plasticité pour s’adapter à la situation.

De cette attitude de base, découlent les 5 recommandations suivantes :

1-Démarrez avec ce que vous avez.

Au lieu de suivre la séquence « opportunité- objectif- moyens », étudiez les ressources dont vous disposez (votre personnalité et pas nécessairement votre idée initiale, vos compétences et vos réseaux) ; imaginez les possibilités qu’elles vous ouvrent et agissez en fonction de ces ressources.

2.-Définissez la perte acceptable à chaque grande étape de votre projet.

Au lieu de viser une rentabilité terminale et de minimiser les risques de perte, limitez votre risque en fixant une limite de perte de temps et d’argent à chaque grande étape.

  1. Tirez parti des surprises

Au lieu de faire des simulations pour repérer et limiter les risques, regardez les « mauvaises » nouvelles et les surprises comme des indices potentiels de nouvelles opportunités.

  1. Construisez votre projet comme un patchwork évolutif de partenariats.

Au lieu de considérer les concurrents comme des rivaux à combattre, établissez vos partenariats clés du moment et cherchez à co-créer avec les partenaires intéressés.

5. Construisez le futur.

Au lieu de chercher à prévoir comment les forces du marché produiront le futur, concentrez-vous sur les actions que vous pouvez contrôler pour obtenir les résultats que vous désirez.

C’est ce type d’attitude qu’ont pratiquée les entrepreneurs de startup observés par S. Sarasvathy mais aussi celui qu’on adopté les grands visionnaires créateurs des innovations de rupture.

 

Conclusions.

Est-ce à dire que c’est l’attitude à adopter par tout entrepreneur de startup et à toutes les étapes de son projet ? Notons quelques éléments de réponse à cette difficile question :

-L’attitude de « l’effectuation » particulièrement adaptée aux entrepreneurs engagés dans une innovation de rupture, parait pertinente pour tout entrepreneur de startup dans la phase initiale de son projet.

-Le « lean startup » est recommandée pour tout projet impliquant des mises au point techniques et longues, sans doute aussi au début du projet.

-La construction d’un BM et la réalisation d’un BP finissent toujours par être incontournables lorsqu’on sollicite des adhésions.

 

Aucune reproduction ne peut être faite de cet article sans l’autorisation expresse de l’auteur ».  A.Uzan.29/09/2014