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Après avoir présenté la gamme des stratégies globales (« corporate ») offertes au choix d’un dirigeant lorsqu’il vise à conduire le développement de l’ensemble de son entreprise, (voir l’article https://outilspourdiriger.fr/les-strategies-globales-denreprise/ ) il nous faut recenser les stratégies applicables pour guider le développement de tel ou tel de ses différents domaines d’activités (DAS), stratégies dites « concurrentielles » ou « business strategy ».

Beaucoup d’entreprise gèrent, en effet, plusieurs types d’activités et toutes savent que, pour assurer leur survie et leur croissance, elles doivent constituer un portefeuille de produits d’âges différents.

Dans l’un comme l’autre cas, il est peu probable qu’une stratégie unique soit adaptée ; chaque activité ou chaque produit d’un âge donné est généralement soumis à des contraintes commerciales, techniques etc. différentes et exige des compétences, des moyens et des programmes actions spécifiques, une stratégie particulière.

Le choix de cette stratégie se fonde sur une segmentation stratégique et un double diagnostic.

La segmentation stratégique.

C’est la définition des « domaines d’activités stratégiques ou DAS » ; elle consiste à diviser l’activité générale en sous-ensembles aussi homogènes que possibles quant au besoin de stratégie particulière. Dans l’idéal, un segment stratégique homogène (DAS) regroupe des produits et services qui sont soumis aux mêmes contraintes externes (mêmes clients, même marché, mêmes concurrents, etc.) ; qui utilisent les mêmes ressources internes (mêmes technologies, mêmes compétences, même chaîne de valeur, fortes synergies, etc.) ; et donc, qui ont les mêmes facteurs-clés de succès. On approche cet idéal en regroupant au mieux les activités élémentaires dont on connaît généralement les caractéristiques (clients, fonctions chez le client, technologie et ressources internes de production, etc.) et les facteurs clés de succès.

Le diagnostic externe et interne de chaque DAS.

Le diagnostic externe consiste à repérer les opportunités et les menaces potentielles présentes dans  l’environnement sociétal, l’environnement concurrentiel et l’environnement international ; dans les tendances diverses qui sont à l’œuvre dans la société et esquissent l’avenir (voir modèle PESTEL) ; dans les forces qui conditionnent le succès dans son secteur d’activité (voir modèle des « 5 forces » de M. Porter) ; dans les contraintes de l’internationalisation.

Le diagnostic interne consiste à repérer les ressources et surtout les compétences distinctives détenues par l’entreprise et susceptibles de constituer un avantage concurrentiel durable (voir modèle VRIN) ; et à repérer dans laquelle ou lesquelles de ses activités internes elle fait mieux que ses concurrents sur la plan de la qualité, du coût, du service rendu, etc. (voir modèle de la chaîne des valeurs).

Dans un article ultérieur, on reviendra en détail sur ces trois opérations dont les résultats fondent le choix des stratégies de DAS ou stratégies concurrentielles.

Pour le moment, tentons de présenter clairement les principales stratégies de DAS possibles :

-les stratégies génériques de Porter ;

-les stratégies concurrentielles de « l’horloge » de Bowman ;

-les stratégies fondées sur les critères de choix des clients de Treacy et Wiersema ;

-la stratégie « Océan bleu » de W.C.Kim et R.Mauborgne ;

-les stratégies d’innovation.

 

  1. Les stratégies génériques de Porter.

Pour M. Porter, toute stratégie vise à exploiter et développer un avantage concurrentiel dans un marché ; le choix de la stratégie dépend, donc, de la nature de l’avantage concurrentiel détenu ou visé (coût ou différentiation) et de la largeur du marché visé ; ce qui ouvre trois possibilités.

La stratégie de domination par les coûts.

C’est le choix à retenir si l’avantage concurrentiel tient à la capacité de posséder et de maintenir durablement une supériorité sur ses concurrents en termes de coût, dans un large marché particulièrement sensible au prix.

Cette capacité distinctive ne peut être construite et maintenue durablement que si le marché est large et très sensible au prix et qu’on peut faire ou espérer faire durablement des économies d’échelle (réduction du coût fixe unitaire), des économies de standardisation (réduction du coût variable unitaire), des économies de gamme ou de management (réduction des coûts de gestion), des économies d’externalité (report de coûts sur l’environnement), des économies de réseau (un produit est jugé d’autant plus utile qu’il a d’utilisateurs), des économies de synergie avec des partenaires (voir l’article « Effet et industries de réseau ». https://outilspourdiriger.fr/effet-et-industries-de-reseau/)

La stratégie de différenciation.

C’est le choix à retenir si l’avantage concurrentiel tient en la capacité d’offrir durablement des produits perçus comme quasi-uniques,  par des prospects qui sont moins sensibles au prix qu’à la qualité, le service, le prestige, etc.

Cette capacité distinctive ne peut être construite et maintenue durablement que si on dispose des ressources et compétences capables de bien repérer les attentes de segments de prospects et de s’y adapter très exactement et rapidement, y compris par des innovations de produit ou de service.

La stratégie de niche.

C’est le choix à retenir si l’on possède l’un ou l’autre des avantages concurrentiels ci-dessus mais que l’on vise ou ne peut viser qu’un segment de marché réduit.

C’est, généralement, le seul choix stratégique offert au début de vie des entreprises créées par une personne ou un petit groupe mais le choix s’élargit avec la croissance et la constitution d’un portefeuille de produits, faisant coexister plusieurs types de stratégie : stratégie de niche pour la création d’un « dilemme » ; stratégie de différentiation pour la gestion d’une « vedette », stratégie de coût pour une « vache à lait ». (Voir la matrice BCG)

 

2 – « L’horloge stratégique » de C. Bowman.

L’approche de Bowman est plus commerciale (marketing) que celle de Porter et présente les stratégies  qui sont possibles si l’on considère que l’espace concurrentiel se définit par deux critères : le prix d’une offre et la valeur de l’offre perçue par le client.

On sait que les prospects comparent les offres et que la décision d’achat est fondée sur le rapport qualité/prix (on devrait plutôt dire « services rendus prévus/coûts subis prévus »). On sait aussi que pour une offre standard donnée, sur un marché donné, à un moment donné, le prospect a une idée de qu’il peut attendre de l’offre comme valeur et de qu’il devra encourir comme prix. C. Bowman définit cette attente implicite comme « l’offre de référence », comme base du jugement du prospect.

Considérant cette « offre de référence » comme l’offre moyenne, on peut choisir de combiner différemment la valeur perçue et le prix et, ainsi, dans un espace concurrentiel donné, définir six stratégies concurrentielles viables : la stratégie « sans fioriture »(ou d’épuration), la stratégie de prix bas, la stratégie hybride, la stratégie de différenciation sans surprix (ou de sophistication), la stratégie de différenciation avec surprix, et enfin la stratégie de niche.

C’est ce que montre le graphique ci-dessous : « l’offre de référence » est placée au centre et chaque stratégie placée au croisement de la valeur perçue et du prix. On les regroupera en quatre (voir les couleurs) pour simplifier la présentation.

Stratégie de DAS
Stratégies de DAS

Stratégies d’épuration (« sans fioriture ») et de prix bas (prix bas – qualité basse ou moyenne)

Ce sont les choix à retenir si les clients sont prioritairement sensibles au prix, acceptent un degré de qualité plus faible que l’offre de référence mais représentent un volume de vente suffisant ; elles exigent une forte  maîtrise des coûts. (Exemples : Logan, EasyJet, Walmart).

Stratégie dite hybride. (prix bas – qualité élevée)

C’est l’offre qui est perçue de qualité supérieure à l’offre de référence mais qui est vendue à des prix plus faible. Cette stratégie exige un modèle d’affaire innovant et une très grande maîtrise des coûts. (Exemple: IKEA).

Stratégie de différenciation sans surprix ou avec. (prix moyen ou élevé – qualité élevée)

La stratégie de « sophistication » consiste, généralement, à adjoindre des services à l’offre sans accroissement de prix ; par exemple des années de garantie pièce et main d’œuvre gratuites.

La stratégie de différenciation avec surprix vise à obtenir que l’offre soit vue comme distinctive sur le plan de la qualité et que les clients acceptent d’en payer le prix. Elle met l’accent sur la marque, la qualité et le service. (Exemple : BMW).

Stratégie de focalisation ou de niche. (qualité élevée – prix élevé ou très bas)

Ce peut être l’offre de haut de gamme, de qualité et de prix élevés visant un segment de clientèle limité. (Exemple : Ferrari).

Ce peut être aussi l’offre épurée extrême à très faible prix. (Exemple : « tout à un euro »).

Les autres stratégies figurant sur le graphique conduisent à exiger un prix non justifié par la valeur et sont jugées non viables.

On notera que ce tableau ne doit pas être considéré comme figé. A des degrés divers selon le pays,  l’offre de référence aura tendance à « monter » en qualité et à se stabiliser ou se réduire en prix (Voir les Smartphones, par exemple) ; par ailleurs, on peut prévoir que la diversité des segments de clientèle va  croître. La stratégie doit donc être adaptée.

 

  1. Treacy and F.Wiersema (voir https://outilspourdiriger.fr/criteres-de-choix-dun-produit-et-strategie-commerciale/)

Ces auteurs préconisent de choisir sa stratégie en fonction des trois critères suivants de choix des clients :

– les caractéristiques du produit : caractéristiques techniques, degré d’innovation, d’esthétique, etc.;

– le degré auquel le produit correspond à ses besoins, auquel il est “fait pour lui”;

– les autres éléments relatifs à l’opération d’achat : le prix et les coûts d’achat, la qualité de la livraison, le service, la fiabilité du produit et de l’entreprise, etc.

Tout client classe ces critères et choisit la meilleure offre selon son critère n°1 à condition que l’offre soit convenable sur les deux autres critères.

Toute entreprise doit donc être suffisamment performante sur chacun des trois critères pour être compétitive mais, comme il lui est impossible d’être excellente sur chaque critère, elle ne peut être leader sur son marché que si elle excelle sur un critère.

Le schéma ci-dessous représente les 3 axes stratégiques possibles, l’origine des axes indiquant le seuil nécessaire de compétences (« the minimum threshold ») pour les trois critères.

Trois stratégies
Trois stratégies

(Source =  http://www.enterprise-advocate.com/2012/02/the-tracey-wiersema-value-discipline-model-part-1/)

La stratégie du “meilleur produit” (Product Leadership).

C’est la stratégie à retenir lorsque les prospects servis ou visés font des caractéristiques du produit leur critère de choix n° 1 et attendent le « dernier état de l’art », généralement technique.

Les capacités clés à détenir sont alors les suivantes : capacité de veille et climat de créativité ;

R et D performante ; recherche permanente de nouvelles solutions aux problèmes des clients ; rapidité de mise sur le marché des produits nouveaux ; personnel de haut niveau et lutte contre tout facteur de bureaucratie et de ralentissement de la décision.

La stratégie du “sur-mesure” (Customer Intimacy)

C’est la stratégie adaptée lorsque les prospects servis ou visés font du « sur mesure » leur critère de choix n° 1 et attendent les produits les plus adaptés à leur besoin.

Les capacités clés à détenir sont alors les suivantes : anticipation systématique des besoins ;  minimisation du délai entre demande et livraison ; maîtrise de la gestion d’une large palette de produits ou services rapidement livrables (éléments de base et composition d’ensemble variables) : capacité de financer le coût élevé de fabrication, stockage, promotion, etc. pour gagner la confiance et la fidélité à long terme de ses clients.

La stratégie de « l’excellence opératoire » (Operational Excellence).

C’est la meilleure stratégie lorsque les prospects servis ou visés ont pour critère de choix n°1 la minimisation des coûts de l’achat et des disfonctionnements post-achat.

Les capacités clés sont alors les suivantes : minimisation des frais généraux en optimisant et automatisant le processus de production, de distribution, de gestion des stocks, de facturation et de réception des règlements des clients ; mise en œuvre d’un système performant de logistique et de contrôle de qualité et des coûts.

 

4 – La stratégie « Océan bleu ». (https://outilspourdiriger.fr/deux-approches-de-la-strategie-2-ocean-bleu/)

Pour les auteurs, W.C.Kim et R.Mauborgne, la meilleure stratégie est l’innovation, la création d’un marché nouveau.

Au lieu de se lancer dans la bataille de la part du marché existant où la concurrence fait de plus en plus de « morts » qui « rougissent l’océan », (« Océan rouge ») il vaut bien mieux créer sa place dans

l’«Océan bleu», l’espace des industries nouvelles et de la création de la demande où on est seul.

L’accès à cet espace n’est réservé ni aux seuls innovateurs technologiques ni aux entreprises les plus grandes ; on peut y parvenir si on sait modifier son cœur de métier et recomposer son offre ; et c’est ce qu’ont réussi, par exemple, le Cirque du Soleil, Nintendo, Nespresso, etc.

La démarche doit débuter par le repérage des facteurs clés de succès dans le secteur puis se concentrer sur la recherche d’un nouvel équilibre entre la valeur offerte au client et les coûts de l’entreprise, en recomposant l’offre au moyen de la méthode ERAC (exclure, renforcer, atténuer, créer des facteurs de succès) ; ainsi, on peut, par exemple :

Réduire les coûts de l’entreprise ; en atténuant la qualité de l’offre, en excluant les attributs de l’offre les moins déterminants pour le client, etc. ; donc, en acceptant de ne pas être compétitif sur certains critères. Le Cirque du soleil a retiré les animaux de son spectacle.

Accroître la valeur offerte en renforçant certains attributs négligés par les concurrents du secteur, en en créant de nouveaux appréciés par les prospects. Le Cirque du soleil a jouté de la chorégraphie.

 

5. La stratégie d’innovation (Voir les multiples articles de ce blog ; en particulier ; https://outilspourdiriger.fr/la-fabrique-de-linnovation/, https://outilspourdiriger.fr/linnovation-de-modele-daffaire/, https://outilspourdiriger.fr/linnovation-de-modele-daffaire/)

Une innovation n’est pas une invention mais le lancement puis la diffusion d’un produit nouveau, d’un procédé nouveau de production ou d’une méthode nouvelle d’organisation des relations internes ou des relations avec l’extérieur.

Y-t-il une stratégie d‘innovation ou bien les innovations sont-elles seulement un des moyens de réaliser la stratégie choisie ?

On peut valablement soutenir que c’est la stratégie globale de l’entreprise et/ou la stratégie de DAS qui déterminent la recherche et la mise en œuvre des innovations de procédés, de produits et d’organisation visant à accroître la valeur offerte aux clients ou à réduire les coûts de production et les prix de vente.

La stratégie « Océan bleu » est-elle une stratégie d’innovation ou une innovation de modèle d’affaire au service d’une stratégie de croissance interne ?

La stratégie désignant l’orientation de toutes les actions menées par une entreprise afin d’atteindre un objectif donné, on ne devrait sans doute parler de stratégie d’innovation qu’en présence d’une  volonté de produire un flux régulier d’innovations de produits ou services.

C’est le cas de certaines grandes entreprises de l’électronique, de l’électro-ménager, de la mode, etc. qui se donnent pour objectif de produire systématiquement et régulièrement des produits et services nouveaux ou rajeunis. C’est ainsi qu’on a pu présenter Téfal comme une « organisation orientées conception », caractérisée par une capacité à construire une trajectoire durable d’innovations successives introduisant des ruptures significatives dans l’identité des produits, des marchés et des technologies. (http://business.lesechos.fr/entrepreneurs/innovation-recherche/quelle-strategie-pour-systematiser-l-innovation-60622.php)

 Aucune reproduction, ne peut être faite de cet article sans l’autorisation expresse de l’auteur ».  A. Uzan. 6/06/2016


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