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Source : Mooc EDX “Platform Strategy for Business”   M. Van Alstyne Professor Boston University

co-auteur de “Platform Revolution: How Networked Markets Are Transforming the Economy—and How to Make Them Work for You.”

 

Nous avons tous entendu parler de la croissance des GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft, etc.) et des entreprises du même type. Beaucoup se sont fait une opinion sur ces entreprises et sur leurs impacts économiques et sociaux et beaucoup les utilisent, parfois intensément. Ce n’est, cependant, ni à l’observateur social ni à l’utilisateur de ces GAFA que cet article est destiné mais au dirigeant d’entreprise, actuel ou potentiel.

Ce dirigeant doit mieux percevoir ce que signifie pour son entreprise actuelle ou potentielle la révolution introduite par ces GAFA,  par l’ « approche GAFA », dans les modèles d’affaires et les méthodes de management de chaque fonction de l’entreprise. Pour agir, il faut comprendre ; et, ici, il faut comprendre :

-comment ont évolué les entreprises de type GAFA par comparaison avec les entreprises traditionnelles ;

-comment fonctionne ce type d’entreprise, ce qu’est une « business platform » ou « networked platform » ;

-quel est le ressort principal de la croissance et de l’influence des GAFA;

-comment les entreprises traditionnelles actuelles doivent réorienter leurs politiques.

 

  1. Vitesse et modalités du développement des GAFA.

Prenons une mesure rapide du développement de ce type d’entreprises et des caractéristiques de ce développement.

Tableau 1

Comparaison Gafa-autres

 

 

 

 

 

Source : Mooc EDX “Platform Strategy for Business”

Tableau 2

Classement marques Gafa

 

 

 

 

 

 

 

Source : Mooc EDX “Platform Strategy for Business”

Comme l’indiquent les tableaux 1 et 2 ci-dessus et d’autres sources, l’évolution des GAFA par rapport aux entreprises traditionnelles présentent les trois caractéristiques suivantes :

– elles ont crû à très grande vitesse; en une dizaine d’année, les capitalisations boursières des principales GAFA ont rejoint celles de leurs homologues grandes entreprises industrielles ; les marques des principales BAFA ont supplanté les plus grandes marques du 20eme siècle et sont devenues les entreprises ayant le plus de valeur au monde.

– par contre, les GAFA occupent nettement moins de personnel que leur homologues entreprises traditionnelles;

– et, si on analyse la répartition des actifs des plus grandes sociétés américaines, on observe qu’en quarante ans les actifs incorporels passent d’environ 20 % à 80% du total.

La croissance de l’activité, de la renommée, de la valeur boursière des entreprises de type GAFA a été  beaucoup plus rapide que celle des grandes entreprises traditionnelles mais avec un recours beaucoup plus faible au personnel et aux actifs corporels, ce qui est pour le moins étonnant.

 

  1. Fonctionnement et définition de ce type d’entreprise GAFA.

Tableau 3

Plate forme d'intermédiation

 

 

 

 

 

 

 

 

Source https://www.applicoinc.com

Tableau 4

Gafa intermédiation

 

 

 

 

 

 

Source ; Mooc EDX

Comme l’indiquent les tableaux 3 et 4 ci-dessus, ce n’est pas la production d’un produit ou d’un service qui caractérise ces entreprises mais l’intermédiation qu’elles réalisent entre producteurs et utilisateurs, le plus souvent sans produire de bien elles-mêmes. C’est le cas des réseaux sociaux, des entreprises de e-commerces, de Uber, etc. Et quand elles réalisent un produit à vendre, comme Microsoft ou Apple, elles réalisent l’intermédiation entre producteurs et utilisateurs d’outils facilitant l’usage de ce produit (applications).

C’est ce qui explique deux des caractéristiques ci-dessus présentées ; pour une capitalisation boursière semblable à une entreprise traditionnelle homologue, elles ont beaucoup moins d’actifs corporels et de personnel parce qu’elles ne produisent pas de bien mais un service d’intermédiation. Elles fonctionnent comme un écosystème ouvert à la collaboration de beaucoup de partenaires et visant à rapprocher et faire échanger producteurs et utilisateurs.

La nouveauté et la complexité du phénomène expliquent que la définition de ce type d’entreprise ne soit pas encore totalement stabilisée, comme le montrent les définitions suivantes :

Pour le cabinet « Applico » (source de l’image ci-dessus) ; « une plate-forme est un modèle économique qui crée de la valeur en facilitant les échanges entre deux ou plusieurs groupes interdépendants, généralement les consommateurs et les producteurs. Pour que ces échanges se produisent, les plates-formes exploitent et créent de vastes réseaux évolutifs d’utilisateurs et de ressources ».

Pour le Conseil national du numérique « une plate-forme est un service occupant une fonction d’intermédiaire dans l’accès aux informations, contenus, services ou biens édités ou fournis par des tiers. Elle organise et hiérarchise les contenus en vue de leur présentation et de leur mise en relation aux utilisateurs finaux. S’ajoute parfois une dimension écosystémique caractérisée par des relations entre services convergents« .

(voir : https://www.usine-digitale.fr/article/au-fait-c-est-quoi-une-plate-forme.N357509).

Pour l’animateur du Mooc. « Une plate-forme (« business platform » ou « networked platform ») est une entreprise fondée sur la création d’interactions créatrices de valeur entre producteurs et consommateurs externes. La plate-forme fournit une infrastructure ouverte et participative pour ces interactions et définit les conditions de gouvernance. Le but primordial de la plate-forme est de réaliser des correspondances entre utilisateurs de la plate-forme et de faciliter l’échange de biens, de services ou de monnaie, permettant ainsi la création de valeur pour tous les participants ».

La difficulté de la définition tient à ce qu’il ne s’agit pas seulement d’un type d’entreprise mais aussi d’un modèle d’affaire qui tend à devenir dominant et à s’imposer à la plupart des entreprises.

 

  1. Ressort principal de la croissance et de l’influence des GAFA.

Les échanges entre producteurs et consommateurs sont régulés par un système d’intermédiation dont la forme dominante a été et reste le marché, c’est-à-dire un système d’informations et de prix. On sait quelles difficultés éprouve le producteur à créer, produire, faire connaître et satisfaire ses consommateurs tout en capturant un profit. On sait aussi quelles difficultés éprouve le consommateur à repérer le produit qui lui convient le mieux, à négocier, à acheter, etc. Un économiste (R.Coase) a appelé ces difficultés des « coûts de  transactions » et fait observer, à juste titre, que la concurrence entre entreprises portait, en fait, sur la réduction de ces coûts.

C’est pour réduire ses coûts de transaction avec tous ses fournisseurs et ses concurrents et réduire aussi les incertitudes et coûts d’achats de ses clients que l’entreprise du 20eme siècle a cherché à croître en taille et à se procurer ainsi les économies d’échelle nécessaires à la domination par les coûts ou par la différentiation.

L’apparition de l’Internet et du numérique, les innovations qu’ils ont permises, le pouvoir croissant qu’ils ont donné aux consommateurs par rapport aux producteurs, a fait apparaître une nouvelle façon de réduire les « coûts de transactions », réduction basée non pas sur l’offre (économies d’échelle de l’offre) mais sur la demande (économies d’échelle de la demande), plus couramment appelé effet de réseau (https://outilspourdiriger.fr/effet-et-industries-de-reseau/).

Cet effet se produit chaque fois que l’utilité qu’on trouve à un produit et la demande qu’on en fait croissent avec le nombre d’utilisateurs de ce produit ou de produits complémentaires. C’est évidemment le cas du téléphone mais  aussi des réseaux,  sociaux ou d’autres types (information, banque, etc.), des logiciels et autres applications numériques, etc.

Comme l’indique le tableau 4 ci-dessus, l’attrait du PC ou du smartphone a cru avec le nombre d’applications et de développeurs; l’attrait d’Amazon dépend du nombre de producteurs qui passent par lui ;  l’attrait de Uber dépend du nombre de pilotes, etc. Et pour toutes ces entreprises, cet attrait est soutenu et amplifié par les avis et prescriptions émis par les utilisateurs sur les réseaux sociaux, les leaders d’opinion, par le bouche à oreille,  etc.

Les grandes entreprises traditionnelles ont généralement tablé sur l’effet d’échelle alors que les plates- formes d‘intermédiation ont d’abord bénéficié de l’effet de réseau. Aujourd’hui ces dernières devenues « grosses » tendent à obtenir aussi les effets d’échelle et les premières se voient contraintes de construire des communautés qui leur procurent les effets de réseau.

Ce qui est déjà le cas, par exemple, de General Electric (plates-formes pour l’internet des objets) de Honda, de BMW et autres constructeurs automobiles, de Nike et de sa communauté de coureurs et même de McCormick Spice.

 

  1. Les entreprises traditionnelles doivent « inverser» leurs politiques (« Firm Inversion »)

Rechercher l’effet de réseau exige que l’entreprise déplace, « inverse » son attention et ses efforts de l’intérieur vers l’extérieur. Conquérir l’effet d’échelle reste important mais proposer une offre bien choisie et au moindre prix ne peut plus suffire ; les nouveaux pouvoirs du consommateur exige de construire et d’animer une communauté de prospects et clients pour espérer obtenir l’effet de réseau.

C’est donc une réorientation, une « inversion »,  des politiques et du management des principales fonctions de l’entreprise qui est nécessaire : une « inversion » de l’intérieur de l’entreprise vers l’extérieur. Voyons-en les modalités principales.

4.1. En matière de marketing (promotion)

La promotion n’est plus prioritairement affaire de publicité publique mais de prescriptions de leader d’opinion ou d’échanges entre prospects et clients et de viralité. Ce sont les utilisateurs qui, à l’extérieur de l’entreprise, font ou défont la promotion.  Un bon exemple est donné par un vendeur de lunette américain qui expédie cinq paires à son client ;  lui demande de poster dans son réseau social cinq images de lui portant une des paires et de demander l’avis de ses amis pour choisir ; ce qui donne une belle mise en valeur du client, de la marque et des donneurs d’avis.

Beaucoup d’entreprises utilisent cette méthode mais d’autres méthodes sont aussi utilisables.

(Voir par exemple : https://outilspourdiriger.fr/manager-la-diffusion-sociale-de-son-produit/- https://outilspourdiriger.fr/manager-la-diffusion-sociale-de-son-produit/)

4.2. En matière de ressources humaines.

L’accent se déplace des salariés permanents vers les travailleurs indépendants et experts externes ; ce qu’on a appelé « l’Ubérisation » de l’emploi en France et « l’emploi à la demande » aux USA (« workers on tap » ou économie de freelance).  Les managers tendent à devoir gérer, « orchestrer », un réseau de travailleurs indépendants.

Ce déplacement de l’emploi vers l’extérieur et en particulier vers les plates-formes est accentué par la tendance à trouver sur internet, gratuitement ou à prix réduits, beaucoup des services et produits qui étaient vendus par des entreprises.

4.3. En matière de production.

Le processus classique de production et la chaîne de valeurs chère à M. Porter tendent à devenir moins linéaires et plus tributaires d’acteurs externes sinon totalement externalisés. Les applications pour PC et smartphones sont produites hors de l’entreprise et seulement choisies par l’entreprise; c’est aussi le cas des pilotes de Uber, des loueurs de Airbnb, des producteurs ou commerces partenaires d’Amazon. Ici, comme pour les deux fonctions précédentes, l’entreprise manage en permanence ressources internes et ressources externes. 

4.4. En matière d’évaluation financière.

L’évaluation financière des plates-formes d’intermédiation a très souvent parue « exorbitante » aux observateurs, voire aux financiers. Facebook a acheté Instagram pour 1 milliard de dollars alors qu’Instagram n’avait que 13 employés et le tableau 1 ci-dessus montre la même « disproportion » ente valeur et personnel pour de nombreuses plates-formes.

Concernant Uber, par exemple, en 2014 une évaluation financière classique donnait 6 milliards de dollars alors que les investisseurs retenaient 17 milliards de dollars ; l’argument principal des investisseurs étaient qu’il fallait tenir compte du développement rapide probable du réseau, ce qui s’est produit, mais qu’il fallait aussi considérer les opportunités de diversification ouvertes par le réseau : vers le marché de la location de voiture, par exemple, ou le marché de la livraison, etc.

4.5. En matière de R et D et d’innovation.

Ces derniers temps, les recommandations des experts n’ont cessé de préconiser le recours, au moins partiel, aux experts extérieurs à l’entreprise (laboratoires de recherche, start-ups, fournisseurs, etc.) et aux clients ou prospects.

Facebook a gagné sa bataille contre Myspace grâce à la collaboration de développeurs de jeux qui ont passionné les membres du réseau. Apple a été sauvée du désastre par son ouverture aux développeurs extérieurs.

(Voir par exemple : https://outilspourdiriger.fr/les-utilisateurs-innovateurs/- 1 et 2)

4.6. En matière de technologie de l’information

Ici aussi l’évolution tend à donner priorité à l’analyse de l’extérieur.

Ce ne sont plus les ERP ou systèmes de planification internes équivalents qui sont la priorité mais les systèmes de gestion de la relation client (« CRM ») et les systèmes d’analyse et de management des réseaux sociaux (systèmes pour construire la communauté, analyser les sentiments et opinions, optimiser le référencement, planifier l’édition de contenu, etc.)

Des systèmes de « back-office », la priorité est passée aux systèmes «  front-office » et à ce qu’on pourrait appeler des systèmes « out of office ».

4.7. En matière de stratégie.

Ici, aussi, le changement tend à faire passer de la fermeture-protection à l’ouverture-coopération, de la compétition à la coopétition (mélange de coopération et de compétition).

Il est toujours indispensable de se concentrer sur ses compétences de bases et d’innover mais plus utile de coopérer avec d’autres, producteurs ou clients, que de se protéger par des « barrières » ou de chercher à dominer son amont ou son aval.   (Voir : https://outilspourdiriger.fr/approche-actuelle-de-la-strategie/)

C’est donc bien une réorientation du management qu’il faut opérer et aussi une sorte de transformation : réorientation de l’attention du manager : de l’intérieur de l’entreprise vers l’extérieur ; et transformation de sa fonction : de management de subordonnés à « orchestration » d’acteurs indépendants.

 

La fonction d’intermédiation entre producteurs et consommateurs est plutôt ancestrale mais le numérique et les innovations qu’il a permises, en particulier le pouvoir qu’il donne au consommateur et les facilités de communication, ont permis aux GAFA de donner à cette fonction d’intermédiation une ampleur inédite et contraignent  désormais toute entreprises à faire évoluer son modèle d’affaire et ses méthodes de management.

 

Aucune reproduction ne peut être faite de cet article sans l’autorisation expresse de l’auteur.  A.Uzan.9/04/2018

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