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André Uzan

Ancien universitaire

Créateur d’entreprise

Commercialiser son invention selon Capgemini Commercialiser son invention selon Capgemini

Commercialiser son invention, c’est exactement innover. En économie, inventer, c’est concevoir et développer quelque chose de nouveau (un nouveau produit, un nouveau procédé, etc.) censé mieux résoudre un problème vécu par une population donnée. Innover, c’est obtenir que cette population adopte l’invention et accepte d’en payer le prix.

Une innovation est une invention adoptée par les acteurs visés, une invention commercialisée et aussi largement que possible.

On voit tout de suite que les deux opérations, inventer et commercialiser-innover, sont différentes à de multiples égards et en particulier quant aux types et méthodes de travail ; mais on voit aussi tout de suite que leur complémentarité est incontournable et ne peut pas être seulement séquentielle (d’abord inventer puis innover) mais doit être itérative.

C’est ce que confirme un professeur universitaire spécialiste de l’innovation :

« La commercialisation concerne d’autres personnes que les concepteurs de l’invention ; Il faut se mettre à la place de ces autres personnes, comprendre comment ils pourraient percevoir l’innovation, comment ils pourraient percevoir l’innovateur. Ces personnes sont beaucoup plus difficiles à convaincre et nécessitent un subtil marketing ».

L’objectif de l’important travail de Gapgemini que cet article présente ce jour est d’apporter une réponse aux questions suivantes : pourquoi si peu d’entreprises (de l’ordre de 20% au maximum) réussissent la commercialisation des projets pour lesquels ils ont investi beaucoup d’argent et mobilisé beaucoup d’intelligences internes (R et D) et externes (centres de recherches, etc.) ? Et comment peut-on mieux réussir ?

(Voir : https://www.capgemini.com/fr-fr/etudes/scaling-innovation/)

L’enquête conduite pour comprendre et faire des préconisations a conduit à réaliser les opérations suivantes :

-consultations d’éminents universitaires spécialistes de l’innovation ;

-entretiens avec plus de 40 cadres d’entreprises multinationales qui ont réussi ;

-repérage des meilleures pratiques d’innovation.

Le rapport fournit trois grandes recommandations pour réussir son innovation :

1. Se préoccuper très tôt de la commercialisation de l’invention

  1. Prendre en compte la commercialisation dans la gouvernance de l’innovation.
  2. Construire une culture de l’apprentissage et de la flexibilité ou adaptation.

 

Voyons le contenu détaillé de chacune de ces recommandations.

 

  1. Se préoccuper très tôt de la commercialisation de l’invention.

Peu d’entreprises prennent en compte les exigences de la commercialisation assez tôt dans le processus d’invention alors que ces exigences conditionnent le succès de l’innovation. Il faut très tôt prévoir les problèmes d’implantation, de mise en œuvre, de formation, etc. tels qu’ils vont se poser aux clients et se préparer à prendre en compte les changements possibles de leurs besoins ou du marché.

Pour repérer et prendre en compte ces exigences propres à la commercialisation, le rapport propose de s’inspirer des quatre recommandations définis dans le tableau suivant :

Commercialiser son invention

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  • Inclure des commerciaux dans les équipes de génération de l’invention
  • Assurer la formation réciproque des équipes de génération et de commercialisation.
  • Placer des générateurs d’invention dans la fonction de commercialisation
  • Faire tôt des analyses de faisabilité et de viabilité du projet d’innovation
  • Inclure des commerciaux dans les équipes de génération de l’invention

Les équipes d’innovation sont généralement composées de spécialistes de la génération d’invention, génération qui   comprend l’idéation, la mise au point, le prototype, etc. Ces spécialistes n’ignorent pas le type de besoin qu’ils sont censés satisfaire mais ils ne sont pas aussi soucieux que des commerciaux des problèmes d’adoption à affronter.

Inclure en permanence ou par intermittence des commerciaux dans les équipes d’invention aide à cette prise de conscience et préparent le travail des services commerciaux chargés du marketing et de la vente.

On peut aller jusqu’à distinguer clairement la fonction de conception, la fonction de commercialisation qui adapte l’invention au marché et la fonction commerciale qui promeut et vend l’invention, comme le dit le directeur de l’innovation suivant :

« Nos équipes génératrices d’invention se tournent parfois vers les clients pour développer des prototypes fonctionnels itératifs, et parfois collaborent avec les équipes commerciales. Mais comme la commercialisation implique de nombreux services de l’entreprise vous devez parfois créer des équipes de commercialisation complètement distinctes des fonctions de génération et des fonctions de gestion commerciale pour réduire la complexité. »

  • Assurer la formation réciproque des équipes de génération et de commercialisation.

De nombreuses compétences cognitives et comportementales sont communes aux membres des deux équipes.

Certaines compétences sont évidemment propres à chaque fonction et en particulier les préoccupations et attitudes basiques.

Les concepteurs sont centrés sur leur objet et tournés vers l’idéation et la technologie de réalisation du projet alors que les commerciaux sont centrés sur le client et tournés vers les conditions de l’adoption de l’invention.

Il est clair que la collaboration et la formation réciproque est nécessaire pour réunir les meilleures chances de succès.

  • Placer des générateurs d’invention dans la fonction de commercialisation.

L’objectif est de sensibiliser les générateurs d’invention aux défis de la commercialisation.

Ce peut être une affectation temporaire de sensibilisation ou une réunion commune aux étapes clés du projet dont la progression n’est jamais linéaire mais itérative et exigeante en ajustements.

Comme le dit un directeur de l’innovation « Nous travaillons sur l’innovation avec des équipes dédiées mais ces équipes changent de rôles passant de l’idéation à la commercialisation et vice-versa. »

  • Faire tôt des analyses de faisabilité et de viabilité du projet d’innovation.

Ce sont les analyses essentielles au regard de la commercialisation.

L’étude de faisabilité ou « d’utilisabilité » évalue si l’invention est technologiquement et fonctionnellement utilisable sans difficulté pour les entreprises ciblées.

L’étude de viabilité évalue si l’invention est économiquement rentable pour les entreprises ciblées, si l’invention peut contribuer durablement à sa croissance.

On a compris que pour devenir innovation une invention doit satisfaire à deux grands types de contrainte :

-la créativité ou capacité de concevoir et mettre au point un nouveau produit ou procédé ou modèle d’affaire, etc.

– « l’utilisabilité » rentable pour le client visé.

Pour préparer le succès il faut réunir et faire collaborer les spécialistes de ces deux contraintes.

 

  1. Prendre en compte la commercialisation dans la gouvernance de l’innovation.

Ici, le rapport propose de s’inspirer des trois recommandations définis dans le tableau suivant :

 

Commercialiser son invention

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  • Donner plus d’autonomie aux services pour commercialiser l’invention.
  • Créer une startup que l’entreprise intégrera ultérieurement.
  • Apprendre des approches de commercialisation accélérée par la pandémie COVID-19
  • Donner plus d’autonomie aux services pour commercialiser l’invention.

En matière de commercialisation de l’invention, la concentration du pouvoir de décision au seul sommet de l’entreprises peut être de nature à retarder la réalisation et à démotiver les acteurs de la conception, de la préparation et de la réalisation de la commercialisation

Pour réussir la commercialisation, il faut un responsable de projet mais aussi plus d’autonomie doit être donnée à ces acteurs pour accroître leur motivation et leur implication.

Dans les entreprises ayant plusieurs secteurs d’activité, cela peut aller jusqu’à laisser les unités d’affaires décider des innovations à commercialiser car elles sont les mieux placées pour évaluer et réunir les conditions du succès.

  • Créer une startup que l’entreprise intégrera ultérieurement. (« Corporate Venture Building »)

Voir : https://newsroom.startup-palace.com/pourquoi-le-corporate-venture-building-est-certainement-le-meilleur-mod%C3%A8le-pour-cr%C3%A9er-de-3b3d01ad0718

La mission de l’équipe d’innovation et de son chef ne serait plus de créer une invention mais de créer une nouvelle entreprise vendant son invention ; création et vente en utilisant les ressources internes, les financements et les réseaux de l’entreprise-mère et en respectant les indicateurs de succès de l’entreprise.

La start-up créée sera intégrée dans l’entreprise une fois son développement réalisé.

On reconnait là une application de la notion d’intrapreneuriat comme moyen de développer l’esprit entrepreneurial dans l’entreprise traditionnelle.

  • Apprendre des approches de commercialisation accélérée par la pandémie COVID-19.

La pandémie COVID-19 a accéléré l’innovation dans divers secteurs. Elle a obligé les entreprises à improviser et à jeter un regard neuf sur la manière de commercialiser leur invention, ce qui a été le cas en particulier des entreprises du secteur de la santé.

En temps de crise, tout le monde travaille différemment, surmontant les obstacles bureaucratiques, brisant les silos organisationnels et mobilisant totalement ses ressources et capacités.

 

  1. Construire une culture de l’apprentissage et de la flexibilité ou adaptation.

Ici, le rapport propose de s’inspirer des trois recommandations définis dans le tableau suivant

Commercialiser son invention

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  • Promouvoir une culture d’apprentissage de la commercialisation de l’invention.

Un élément clé de cette culture est la capacité de prendre des risques, d’accepter l’échec et d’en tirer des leçons.

L’échec est toujours lié à la prise de risque mais, alors, c’est le repérage rapide de l’échec qui importe pour apprendre et réagir. Des entreprises célèbrent même les efforts d’innovation qui échouent rapidement pour encourager l’expérimentation et l’apprentissage et pour surmonter la peur innée que l’on a de l’échec.

  • Supprimer ou réduire les innovations qui « plafonnent » ou réussissent lorsque nécessaire.

La rapidité actuelle des changements technologiques et du raccourcissement des cycles de vie des produits rend nettement plus difficile l’optimisation des portefeuilles de produits ou d’innovations.

Les contraintes de financement ou de rentabilité, les tendances de la demande ou les évolutions de la concurrence peuvent conduire à abandonner des innovations « laborieuses » et même des innovations réussies pour se tourner vers des innovations nouvelles. L’agilité doit primer sur le conservatisme.

  • Rester flexible lors de la commercialisation de l’invention.

Les marchés évoluent très vite sous l’influence des innovations ou des consommateurs. L’incertitude qui en découle doit conduire à rester flexible, agile, pour réévaluer rapidement les priorités et opérer les « pivotages » nécessaires.

Comme le dit un directeur de l’innovation d’une grande entreprise :

« Une culture innovante consiste à comprendre l’environnement, les tendances et la capacité d’extrapoler ce qui se passe maintenant et ce qui va advenir demain. Puis elle conduit à transformer cette compréhension de l’utilisateur, de l’environnement et des tendances en une proposition de valeur, et à le faire aussi rapidement que l’évolution de la demande et des conditions du marché. Aujourd’hui, nous devons simplement être plus rapide et plus agile pendant ces périodes et répartir le financement selon les priorités du moment »

 

Incontestablement, ce rapport « pointe » une question importante en matière d’innovation et livre des recommandations pertinentes pour réussir.

 

Ce thème a été traité à plusieurs reprise dans ce blog. On peut compléter son information, en lisant, en particulier :

 

Aucune reproduction ne peut être faite de cet article sans l’autorisation expresse de l’auteur ».  A. Uzan. 111/2020